Publié au Japon entre 2000 et 2002, au sein de la revue Manga Erotics F des éditions Ohta, Casterman nous propose un album de luxe pour ces Enfants de l’Araignée : un pavé de 400 pages, à la couverture en carton dure, rassemblant les deux tomes de l’édition originale.
On pense immédiatement à Taiyô Matsumoto et en particulier à Amer Béton, aussi bien pour son graphisme que pour son univers d’anticipation urbain, voire Akira pour les aspects militaires et la drogue.
L’histoire nous propose de suivre, dans une ville prison servant d’immense centre de rééducation, un trio d’orphelins arrachés d’un bidonville qu’ils rêvent de retrouver en même temps que leur liberté. Pour cela ils ont un plan : se payer un billet de train, ou plutôt de métro, en vendant un scoop à une émission télé pirate grâce aux compétences en informatique de l’un d’eux.
Cependant leurs mésaventures vont les amener à découvrir bien trop de choses, dont le secret du mystérieux trou où disparaissent les étudiants jugés inaptes, pour finalement se changer en cavale, avec l’armée aux trousses, entrainés bien malgré eux dans le combat des rebelles.
Il y a un peu de tout dans l’œuvre de Mario Tamura : jeunes délinquants, rafles de réfugiés, prostituées, inceste, drogues, horreur, civilisation en décomposition, révolutionnaires, militaires, totalitarisme, expériences scientifiques, écologie et vaste machination.
Le récit est riche, les rebondissements nombreux, la mise en scène graphique sophistiquée, claire et minutieuse, et l’ensemble présente peu de temps morts jusqu’au dénouement qui demeure néanmoins centré sur la poignée de protagonistes principaux, en dépit d’enjeux à l’échelle de la nation.
Reste que nous avons parfois davantage l’impression d’assister à un Best of du genre plutôt qu’à une histoire propre tant le scénario apparaît par moment fait de bric et de broc avec des personnages qui ont parfois du mal à exister, balancés ici et là au gré des événements.
Signalons également, en raison de la revue d’origine, les personnages féminins systématiquement dénudés ou affublés de tenues très sexy tranchant avec celles relativement classiques du personnel masculin. Sans oublier les quelques cases érotiques ponctuant le récit, pas toujours utiles mais qui participent d’une certaine façon à l’ambiance malsaine et désenchantée du titre.
Une œuvre qui demeure dans tous les cas sympathique, avec son propos social et écologique, plutôt bien mené, à l’histoire intéressante bien qu’un peu décousue par moments. Nous aurions tendance à recommander sa lecture aux amateurs du genre, car le contrat de base se trouve rempli comme on dit, cependant le prix fort de 27 euros nous semble quelque peu exagéré.
(par Guillaume Boutet)
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