Albums

Les étoiles s’éteignent à l’aube - Par Richard Wagamese et Vincent Turhan - Sarbacane

Par Philippe LEBAS le 25 janvier 2022                      Lien  
Les adaptations de romans en BD sont devenues quasiment un genre en soi, qu'il s'agisse de best-sellers (comme "Le bal des folles" ou "En attendant Bojangles", récemment) ou d'ouvrages plus confidentiels, comme celui de Richard Wagamese ici, un des principaux écrivains amérindiens canadiens. Que les éditions Sarbacane et Vincent Turhan, dessinateur et scénariste de ce one shot, en soient remerciés, nous faisant découvrir un romancier talentueux ainsi qu'un dessinateur qui ne l'est pas moins.

L’histoire est simple et belle. En Colombie britannique, un jeune homme, Franklin Starlight, est appelé par son père alcoolique qui l’avait abandonné bébé, pour l’accompagner dans ses derniers instants. S’engage alors un voyage dans ces magnifiques paysages des montagnes de l’ouest du Canada (là où se déroulait Into the wild, le livre de Jon Krakauer superbement adapté au cinéma par Sean Penn). Franklin et son père, Eldon, vont dès lors s’apprivoiser, le fils découvrir l’histoire de son père (et de sa mère) et donc la sienne propre, ainsi que celle des indiens ojibwé, des sang-mêlés comme ils se nomment eux-mêmes.

Les étoiles s'éteignent à l'aube - Par Richard Wagamese et Vincent Turhan - Sarbacane

Ce voyage initiatique est superbement adapté par Vincent Turhan [1], muni de ses crayons pastel et de sa palette de peintre. Tout est douceur ici, à commencer par la splendide couverture. Mais les 140 pages sont à l’avenant, un appel à la contemplation, sans pour autant nous masquer la cruauté de la vie pour ces Indiens qui n’en sont pas vraiment, la place destructrice qu’y occupe l’alcool.

L’atmosphère du roman [2] est rendue avec justesse, en évitant l’écueil de reprendre trop d’extraits d’un texte originel de qualité et d’être trop bavard.

Cela conduit forcément à faire des choix et à ne pas parler de tout, notamment de l’expérience traumatisante vécue par le père lors de la guerre de Corée, évoquée dans deux petits phylactères (p.99), rappelant la disparition de son ami lors d’une mission de reconnaissance, version tout à fait différente de celle du roman, qu’on vous laissera le soin de découvrir par vous-même. Ce fait mis à part, l’adaptation est fidèle, et surtout, (et c’est ce que l’on en attend), utilise les moyens propres de la BD. On en prendra pour exemple la splendide planche (p.35) sur le départ sans retour du père avec son fils, avec une alternance de plans, resserrés au début pour terminer dans un plan d’ensemble. Pas un mot, tout passe par l’image, les regards. C’est beau tout simplement.

En ces temps où semble-t-il la quête d’identité a le vent en poupe, Wagamese, et Turhan avec lui, nous offrent une belle méditation sur les sang-mêlés, ces sans racines (aimés ni des Indiens ni des Blancs) qui se cherchent, sans toujours y arriver, se noient parfois (dans l’alcool) mais trouvent la rédemption finale, dans la nature ici. Une histoire humaine en somme, avec ses hauts et ses bas, ses errances et ses fulgurances.

(par Philippe LEBAS)

Cet article reste la propriété de son auteur et ne peut être reproduit sans son autorisation.

🛒 Acheter


Code EAN : 9782377317776

[1Vincent Turhan est un jeune auteur de 36 ans, participant au collectif Dig, et auteur de deux BD, Transatlantique, parue aux éditions Magellan&Cie, et Le chemin des égarés, aux éditions Les Enfants Rouges.

[2Paru en 2015 et traduit en français aux Editions Zoé, c’est l’un des derniers romans de Richard Wagamese, disparu en 2017.

Sarbacane ✏️ Vincent Turhan Adaptation littéraire
 
CONTENUS SPONSORISÉS  
PAR Philippe LEBAS  
A LIRE AUSSI  
Albums  
Derniers commentaires  
Abonnement ne pouvait pas être enregistré. Essayez à nouveau.
Abonnement newsletter confirmé.

Newsletter ActuaBD