Zack Kosinski est un prescient, capable de voir d’autres réalités par-delà la nôtre, capable de vivre sur d’autres “Terres”, parfaitement similaires à la nôtre, mais qui ont parfois évolué de manière subtilement différente...
New Byzance
Depuis les attentats de septembre 2001, le capitalisme a été balayé du paysage politique. Ben Laden est considéré comme un libérateur. Et ses adeptes ont installé l’Utopie fondamentalisme, qui régit depuis plus de 200 ans l’organisation des principales nations occidentales et asiatiques. Une organisation rigoriste et sévère, où les femmes n’occupent plus le moindre rôle d’importance et où la police est omniprésente. Dans ce monde verrouillé, terriblement ordonné mais paradoxalement paisible, Zack exerce ses fonctions de prescient d’une bien étrange manière... Chargé de projeter dans l’esprit de ceux qui sont soupçonnés de crime par la pensée, des rêves agissant comme une sorte d’électrochoc, il reconfigure ainsi mentalement tout contestataire de l’Utopie Fondamentaliste. Zack est donc un rouage essentiel du système. Jusqu’où jour où on lance un mandat de recherche contre lui pour une raison inconnue. Le prescient n’a alors plus qu’à se jeter sur les chemins de la clandestinité. Et pour la première fois de sa vie affronter l’inconnu...
New Harlem [1]
Tous les postes-clé de la société sont aux mains des Afro-Américains du Black Order, descendants des Black Panthers. Les Blancs, eux, survivent dans des ghettos crasseux où la brutalité et la misère font loi. Certains parviennent toutefois à prendre l’ascenseur social, pour peu qu’ils aient un don spécial intéressant les hauts responsables noirs, comme les prescients par exemple, très appréciés pour leur capacité à anticiper les soubresauts du monde politique et économique. Tiré du misérable cocon familial contre une importante somme d’argent, Zack va rapidement découvrir que son pouvoir n’intéresse pas seulement les Noirs. Mais aussi la Fraternité blanche, une dangereuse organisation terroriste qui va organiser son enlèvement ...
New York
De nos jours, Zack a 20 ans. Mais n’en a réellement vécu que la moitié, puisqu’il vient de passer une décennie plongée dans un étrange sommeil provoqué par son père, qui dans cette réalité est un scientifique de renom. Soigné dans un hôpital où il se remet doucement de l’immobilité contrainte de son corps, le jeune homme, qui a perdu jusqu’au souvenir de son nom, est constamment en proie au doute et au questionnement. Son passé le hante, son présent l’angoisse, quant à son futur, il l’a entièrement remis entre les mains d’une jeune infirmière, Tia Brown, qui s’efforce de lui faire reprendre pied dans le monde réel. Le problème, c’est que Zack doute également de sa propre réalité.
Un pari osé
Arrivé il y a peu chez Glénat avec Back World, Corbeyran ne se ménage pas (comme à son habitude) et scénarise donc 10 tomes [2] pour trois séries qui vont se rejoindre pour un final qu’on nous promet décapant. Eric Chabbert, à qui on doit déjà Docteur Monge avec Bardet et Nova Genesis avec Boisserie, dessinera New Byzance et l’opus final. New Harlem sera traité par Tibéry qui vient de conclure l’Empire de la Raison, et New York sera mis en scène par Defali à qui on doit déjà Asphodèle, la Loi des 12 Tables et le Syndrome de l’Hyde. Le trio de cette dernière série sera d’ailleurs complet car Guérineau viendra signer l’ensemble des couvertures des dix albums pour donner une continuité visuelle à celles-ci. A l’inverse du Voyageur, son nom n’apparaîtra pourtant pas ! Est-ce que le lectorat s’est estimé floué d’acheter des albums où l’on cite Guarnido, mais dont on ne profite que des (très belles) couvertures ?
Le piège des mêmes personnages adapté par différents dessinateurs est habilement déjoué en présentant Zack à différents moments de sa vie : enfant, jeune homme, et quadragénaire. Si on nous parle de trois séries pouvant se lire indépendamment, on reste pourtant scotché par la qualité du premier tome qui vient de sortir dans les bacs : le dessin est virtuose, les cadrages inventifs nous font profiter des décors superbement travaillés, et l’intrigue colle directement le lecteur dans son fauteuil en l’entraînant sans longue introduction dans une course-poursuite où les éléments sont tour à tour évoqués pour structurer le nouveau monde qui s’offre à nous. Si le reste est du même acabit, on va voir évoluer un monde dense et captivant. Comme Saint Thomas, on demande à voir, mais on se prend à espérer !
Dans un milieu où il devient compliqué de tirer les séries en longueur (lassitude des lecteurs et parfois des auteurs), la course à la bonne idée est lancée depuis quelques années. Glénat avait déjà innové avec des concepts comme ceux du Décalogue ou du Triangle Secret. En parallèle du Voyageur, le lancement de cette nouvelle série multiple devrait réjouir le public si la qualité du premier tome se maintient sur les différents niveaux et dans le temps !
(par Charles-Louis Detournay)
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[1] Les couvertures de New Harlem et New York sont temporaires et peuvent être modifiées.
[2] Il se murmure que l’idée de base d’Uchronie[s] aurait été amenée par Éric Chabbert. On peut aussi se demander pourquoi les dix titres d’albums débutent par la lettre R, comme Alan Moore l’avait réalisé dans V pour Vendetta ? Ces questions, et bien d’autres, trouveront leurs réponses dans une future interview accordée par le dessinateur de New Byzance.
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