Quatrième album de Jim Bishop, auteur de Seine Saint-Denis, Lettres perdues (Glénat) est un sublime voyage initiatique d’un jeune homme qui va explorer le monde, n’ayant que son tempérament rêveur et une poignée d’amis baroques pour l’aider dans son dur périple. Après deux récits de genre qui exploitaient déjà son dessin saillant, Nubo, le gardien nuage (Les Éditions Bonstre) et Jill & Sherlock (Ankama), l’auteur francilien lance une bouteille à la mer avec cet album virtuose.
Tout en rondeur et en couleurs tropicales du plus bel effet, Lettres perdues est à un carrefour entre récit d’aventure, humour complètement absurde – imaginez un monde où des poissons font la loi depuis un robot contrôlé par la pensée, où des poissons-clowns livrent le courrier sans se prendre la tête, et où une terrible pieuvre prénommée Howards Phillips sème la terreur parmi les espèces marines. Ce doux surréalisme est pourtant utilisé avec le plus grand sérieux, rappelant le dramatique BoJack Horseman, l’épique et bizzaroïde Saga ou l’enchantement des mondes de Miyazaki.
Tout ce beau monde vit avec une facilité déconcertante des tribulations qui tiennent du road movie, Iode allant chercher sa lettre et Frangine accomplir sa mission secrète sous l’œil hagard de l’agent de police Cycy, de la comédie -mais jamais débile- et du drame intimiste plus osé, le lecteur découvrant que le récit s’effeuille en dévoilant les blessures émotionnelles de ses personnages, grands naufragés d’un océan de turpitudes.
Vraiment saisissante, Lettres perdues prédit de très bonnes choses quant à l’avenir de Jim Bishop, un nom qu’il faut définitivement retenir.
(par Auxence DELION)
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Lettres perdues - Par Jim Bishop (scénario et dessin) - Glénat - Sortie le 15 septembre 2021 - 21 x 29 cm - 200 pages couleur - 22 €