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Lewis Trondheim et les petits riens de l’autobiographie

Par Morgan Di Salvia le 29 octobre 2009                      Lien  
Quinze ans après son premier voyage, Lewis Trondheim retourne aux États-Unis et en raconte des bribes dans le quatrième livre des {Petits riens}. C’est l’occasion de mesurer son travail en autobiographie, et les différents chemins qu’il a empruntés.

Quinze ans après… Contrairement au titre du romancier médiatiquement omniprésent Alexandre Jardin, qui retourne sa veste et le socle de son succès, Lewis Trondheim n’a pas décidé de prendre le contre-pied total à son travail autobiographique. Tout en nuances, la parution du quatrième recueil des Petits riens fait mesurer à quel point Trondheim expérimente, et cherche à toujours se surprendre lorsqu’il aborde l’autobiographie. Petit retour en arrière, avant de parler de l’album proprement dit.

Au début de l’année 1993, Lewis Trondheim entame Approximate Continuum Comix chez Cornélius. Dans ce comix où il est seul maître à bord, il prévoit d’abord de développer son projet La Mouche, et songe à nommer ce périodique Bzzz. Rapidement, la vie dépasse ce plan initial, et inspiré par lecture des auteurs nord américains Seth, Joe Matt ou Robert Crumb, Trondheim raconte à la première personne son quotidien. Du moins une partie, choisie avec soin, qui raconte une histoire, mais finalement ne dévoile pas grand chose de son intimité. Comme l’écrivait Killoffer dans la postface du recueil qu’a publié Cornélius en 1995 : «  Plus que jamais, Lewis avance masqué ». Rapidement, Lewis Trondheim devient une référence en matière d’autobiographie. Il va faire des émules.

Lewis Trondheim et les petits riens de l'autobiographie
Panaché de récits autobiographiques
© Trondheim - Cornélius - Dargaud - L’Association

Alors, plutôt que de répéter sans cesse une recette, il va moduler le principe de ses planches autobiographiques. En 1996, il se frotte au journalisme avec Les Aventures de l’Univers publiées dans le magazine Les Inrockuptibles, puis en album chez Dargaud l’année suivante. Au début des années 2000, il replonge, avec des Carnets de Bord, à l’Association cette fois. Il s’impose une contrainte simple et pas révolutionnaire : ces carnets seront des fac simile. Pas de correction d’orthographe, pas de correction du dessin, pas de crayonnés. Autour de la thématique du voyage, il y aura quatre carnets de ce type entre 2001 et 2003, remplis de dessins d’après nature, une révolution pour un dessinateur qui se dit médiocre.

En 2005, Lewis Trondheim pose une réflexion intéressante sur le vieillissement des auteurs de bande dessinée : Désoeuvré. Un essai dessiné qui utilise une narration autobiographique et qui justifie pleinement l’arrêt de ses carnets de bords, devenu trop répétitifs. Car ce livre arrive dans une grande période de doute pour l’auteur. Trondheim a peur de se répéter et de sombrer dans la déprime. Il décide de lever le pied après quatorze années le nez dans le guidon. Mais, enthousiasmé par son sujet, il va tout de même se remettre à dessiner pour essayer de comprendre pourquoi beaucoup d’auteurs de BD vieillissent mal. Il mène une enquête auprès de grands anciens, interroge Delporte, Gotlib, Tibet et d’autres. C’est l’exception qui confirme la règle. Pour la première fois dans son travail autobiographique, il se livre.

En profitant d’une refonte de son site Internet, Trondheim débute un blog : Les Petits riens. L’argument pour se remettre à dessiner de l’autobio ? L’envie d’apprendre l’aquarelle ? On le voit, à chaque fois que Lewis Trondheim s’est remis à cette veine, il a cherché un moyen de surprendre, sinon de se surprendre.

Un extrait des "Petits riens"
© Trondheim - Delcourt

Nous voici donc quatre ans plus tard, avec des Petits riens qui en arrivent à un quatrième recueil. La formule de cette série est très libre et finalement, synthétise tous les précédents travaux autobiographiques de Trondheim : il y est question du quotidien, de voyages, du métier d’auteur de bande dessinée, de la vie de famille,… Avec des œillades complices au lecteur, l’auteur joue sans cesse avec son image de vieux con bougon et souligne les petits bonheurs et malheurs qui donnent à la vie tout son sel. Le secret du plaisir que procure la lecture de ces Petits riens est peut-être simplement là : Lewis Trondheim s’amuse.

Connaissant l’oiseau, les Petits riens ne seront sans doute pas la dernière forme d’autobiographie qu’il utilisera pour raconter les petits embarras et joies du quotidien. Vivement la suite.

(par Morgan Di Salvia)

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