Alors qu’il vient de participer à l’arrestation d’un tueur surnommé « La chanson douce », Lloyd Singer se retrouve confronté à sa propre histoire familiale et au retour d’un étrange serial killer. Alors que les deux événements semblent indépendants, l’arrestation de ce tueur « modèle troisième âge » va déclencher un processus de réminiscences chez l’agent du FBI.
Une vérité inattendue et tragique relie les deux histoires (l’enfance de Singer et le fait divers) et leur donner sens. Sur les traces de Lloyd, nous revisitons l’histoire intime du héros sous un jour inédit ; la psychothérapie rejoignant le thriller. Lloyd Singer retrouve sa sœur cadette Esther aux prises avec une sévère anorexie. Le médecin-psychiatre qui s’occupe d’elle tente tout ce qu’il peut pour lui sauver la vie à l’aide d’une psychothérapie (voir premier tome) à laquelle participe l’agent fédéral. Le médecin pense qu’Esther souffre du rôle qu’elle a pu jouer naguère dans l’histoire familiale. Les langues ne tardant pas à se délier autour de l’enfance des Singer et de la mort accidentelle de leurs parents, les révélations vont permettre de relier les deux récits menés en parallèle à grands renforts de flashbacks.
Ce diptyque s’avère bien mené non sans suivre une tendance de plus en plus présente dans ce genre : mener de front un thriller haletant et rythmé et dévoiler progressivement les secrets (de famille) qui pèsent sur le quotidien du personnage principal.
Distillés au fur et à mesure des précédents albums les éléments du puzzle psychologique et intime de l’agent Singer se rassemblent progressivement. L’alternance des deux fils narratifs est parfaitement maitrisée par un scénariste dont on devine la forte implication dans son sujet. Non-dits, maladresses, mauvais choix, s’articulent autour du mystère de la personnalité de Singer et de ses parents.
Si la double personnalité et les tourments intérieurs des héros (voire des super-héros !) ont déjà été traités au détour des vignettes, les auteurs les abordent ici un sujet totalement neuf, avec sensibilité et modestie, tout en réussissant un beau tour de force narratif.
La série Makabi rebaptisée Lloyd Singer depuis son arrivée chez Bamboo sous le label Grand Angle a connu un beau "lifting" : nouvelle maquette, nouveau format, mais aussi nouvelle lecture grâce l’ambition de son scénariste Luc Brunschwig de nous faire pénétrer encore un peu plus dans l’intimité de l’ex-comptable devenu agent pour le compte du FBI.
Si le scénario traduit bien, par sa complexité et sa richesse, l’évolution de la série, choix revendiqué par le scénariste, la qualité graphique est également au rendez-vous. Olivier Martin, le nouveau dessinateur de la série, est parvenu à assurer une belle transition à la suite de son prédécesseur Olivier Neuray grâce à un dessin personnel qui n’efface pas les qualités originelles.
La mise en œuvre de ce nouveau cycle, entre thriller et thérapie familiale, se révèle particulièrement efficace sans parler du dénouement qui apporte un éclairage supplémentaire à la personnalité d’un héros dont les auteurs fendent l’armure au fil des albums. Du beau travail !
(par Patrice Gentilhomme)
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