Madones et Putains - Par Nine Antico - Ed. Dupuis / Aire (...)

Madones et Putains - Par Nine Antico - Ed. Dupuis / Aire libre

Par Louis GROULT le 25 janvier 2023

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Madones et Putains - Par Nine Antico - Ed. Dupuis / Aire libre

C'est une sacrée fresque que nous propose Nine Antico avec "Madones et Putains". Elle nous raconte, à travers trois histoires, l'histoire italienne et la condition féminine dans le pays au 20e siècle.

Nine Antico est une artiste complète. Après avoir écrit plusieurs romans graphiques, comme Coney Island Baby ou Le Goût du paradis, elle réalise en 2021 le film Playlist qui évoque le parcours d’une autrice de bande dessinée. Elle revient, en ce début d’année 2023, à la bande dessinée avec Madones et Putains, un album publié chez Aire Libre.

Madones et Putains - Par Nine Antico - Ed. Dupuis / Aire libre

Cet album est à la jonction de plusieurs univers et c’est ce qui en fait la richesse. Nine Antico nous raconte l’histoire de trois jeunes Italiennes, dont les prénoms et les destins tragiques font références à trois saintes : Agata, Lucia et Rosalia. Dans chacune des trois nouvelles, on découvre donc à la fois, la vie des jeunes femmes au 20e siècle et celles des saintes. C’est de ce parallèle que surgit l’aspect critique de l’album. On se rend compte que du Moyen Âge à nos jours, la condition féminine a gardé en partie son côté tragique.

Cette jonction d’univers se passe aussi au niveau du dessin. L’inspiration principale de Nine Antico semble être la gravure, une technique fer de lance du Moyen Âge mais aussi de la bande dessinée indépendante. L’album est en noir et blanc, avec quelques petites touches légères de couleur, principalement du rouge, qui rappelle le sang, le feu et la lave très présents dans l’album. Cette utilisation parcimonieuse de la couleur rappelle Le Bleu et une couleur chaude dans laquelle les questions autour de la condition féminine étaient au cœur de l’intrigue.

La force du dessin de Nine Antico, c’est sa précision. Son trait sombre est assez épais, bien qu’elle garde une grande précision dans les détails des visages et des décors. Son sens aigu de la mise en page ne l’empêche aucunement de sortir le texte des bulles ou de casser le gaufrier classique pour rendre sa narration fluide. Enfin, nombre d’images marquantes et puissantes jalonnent la BD à commencer par la couverture qui rappelle sans détour La Vénus de Botticelli.

On voyage de Naples à la Sicile, d’un sanatorium à la campagne, d’un monde en paix à la seconde guerre mondiale. En refermant l’album, on a l’impression d’avoir communié avec le peuple italien et d’avoir partagé avec lui ses grands drames.

On voit aussi se dégager quelques-uns des grands thèmes de ce pays, comme la misère, la corruption et la mafia. Des grands thèmes qui nous rappellent ceux du Nouvel Hollywood dont beaucoup des réalisateurs avaient des ancêtres italiens ayant émigré aux États-Unis. Il n’est pas étonnant que cela refasse surface sous la plume d’une dessinatrice, qui, elle aussi, est réalisatrice de cinéma.

Voir en ligne : Nine Antico sur France Inter

(par Louis GROULT)

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