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Marc Gricourt (Maire de Blois) :"Si la bande dessinée peut contribuer à renforcer l’ image d’une ville ancrée dans la culture contemporaine, tant mieux ! "

Par Patrice Gentilhomme le 3 février 2015                      Lien  
C’est le 6 février que sera officiellement inaugurée la Maison de la BD. Prolongement permanent de BD Boum, l’association qui gère le festival BD de Blois depuis plus de trente ans, ce lieu se destine à accueillir non seulement des expositions, des formations et des auteurs en résidence, mais s’annonce déjà comme un pôle culturel important de la région. Rencontre avec l’un des principaux initiateurs du projet, Marc Gricourt, maire de Blois.

Pouvez-vous nous rappeler comment est née l’idée de créer une maison de la BD ?

Déjà, avant mon élection en 2008, j’avais imaginé qu’on pourrait donner plus de visibilité aux associations qui jouent un rôle important dans l’offre culturelle représentée notamment par les Rendez-vous de l’histoire etBD Boum.

Il s’agissait de leur trouver un lieu nouveau en capacité de répondre mieux aux attentes et de permettre un travail tout au long de l’année de ces associations, leur donner une visibilité bien au delà du temps fort que constitue le festival. Il faut en effet savoir que cette association a des actions notamment auprès des scolaires durant toute l’année.

C’était la volonté, partagée par mon équipe, de mettre encore un peu plus en avant l’impact du festival, de l’ancrer plus fortement dans le paysage national, avec une particularité blésoise, tout en préservant l’esprit de l’association.

Sa triple vocation pédagogique, sociale et citoyenne ?

Je crois en effet que l’on est sur quelque chose qui va au-delà du seul temps festivalier avec la venue des auteurs et des éditeurs. Il n’est pas question pour nous d’entrer en compétition avec Angoulême, par exemple. Néanmoins tout le monde s’accorde à dire qu’il y a ici quelque chose de singulier peut-être lié à l’origine du festival, porté par de véritables militants de la BD. J’ai connu les premières éditions, d’abord dans une salle, puis au château, toujours portées par cet esprit militant et bénévole pour arriver aujourd’hui à une manifestation placée parmi les trois plus importantes de France. Toujours gratuite, c’est un aspect auquel nous sommes très attachés.

Marc Gricourt (Maire de Blois) :"Si la bande dessinée peut contribuer à renforcer l' image d'une ville ancrée dans la culture contemporaine, tant mieux ! "
Facile d’accès, la Maison de la BD est située en plein coeur de la ville et à deux pas de la Loire.

Quelle est l’implication de la Ville dans cet accompagnement ?

La ville reste évidemment de loin le premier partenaire financier. Concernant la maison de la BD, nous étions déjà propriétaires du bâtiment, inoccupé depuis longtemps, le lieu se trouve sur le parcours touristique, à proximité du château, en plein cœur historique, à deux pas de la Loire !

On est sur un lieu de passage et d’animations culturelles. L’objectif étant de rassembler et de montrer sur un même lieu toutes les activités portées par l’association, comme l’accueil des scolaires par exemple, cela viendra en plus des interventions dans les établissements.

À cela s’ajoute une capacité pour une résidence d’auteurs, des propositions d’ateliers avec intégration des nouvelles technologies, et enfin une salle d’exposition. C’est donc important pour la lisibilité de tout ce que porte BD Boum en dehors de la période du festival. Au niveau local, c’est aussi un élément supplémentaire d’attractivité touristique à une heure et demie de Paris, au cœur de la Région Centre.

Il y a aussi un partenariat avec l’Éducation nationale puisqu’un enseignant est mis à disposition…

L’association a travaillé en amont pour obtenir ce poste auprès de l’Education nationale. Pour ma part, je suis intervenu pour défendre cette idée comme je l’ai fait dans d’autres circonstances, notamment en faisant passer le message directement au ministre. Le travail pédagogique fait au quotidien avec les enseignants témoigne de la solidité et du sérieux de l’association. Il y a un bilan sérieux et maintenant un lieu parfaitement identifié. Cela a été bien compris et a permis que le ministère s’engage un peu plus de cette manière.

Il y a aussi un engagement de la région pour le mobilier et le matériel informatique et un soutien non négligeable et de longue date pour le festival , notamment à travers la remise des prix. La DRAC [1] nous a aussi aidé.

Convialité, humour et proximité avec les auteurs. De gauche à droite : Marc Gricourt, maire de Blois, Bruno Genini directeur de BD Boum et Jean-Pierre Baron son président , Etienne Davodeau, tous attentifs aux propos de Patrick Gaumer, complice de longue date.

Est-ce aussi une volonté de rompre avec une certaine image "un peu conventionnelle" de la culture en Val de Loire ?

Blois est bien sûr une ville très riche au niveau de son patrimoine historique, mais on ne s’est pas contenté de cela pour intégrer d’autres formes d’arts contemporains avec par exemple, la Fondation du Doute, un lieu unique révélant au passage le mouvement Fluxus. Si la bande dessinée peut contribuer à renforcer l’ image d’une ville ancrée dans la culture contemporaine tant mieux ! On est certes, une ville d’art et d’histoire, mais aussi inscrite dans la modernité, on est sur un territoire innovant !

Comment ce projet a-t-il été accueilli par la population ?

C’était un élément de notre programme électoral, cela a d’ailleurs été présenté de manière très transparente. C’est une affaire de pédagogie en quelque sorte !

Les Blésois restent très attachés à ces moments de festival, donc je ne sais pas si cela pose vraiment question. Ils sont très attachés à tout ce qui peut mettre en valeur la ville où ils vivent, travaillent, pratiquent leurs loisirs. Quand on parle de Blois à l’extérieur, c’est incontestablement un coup de projecteur qui valorise.

Quand j’en ai eu l’idée, je ne suis pas allé vérifier s’il y avait en France des projets identiques ou pas… Il n’y a pas de concurrence avec Angoulême, qui possède une autre dimension. Ici, les fondations reposent non sur la taille mais sur un festival de plus de trente ans, ce n’est pas rien ! Tout cela a démarré de manière très modeste, le passage de Jack Lang a créé un élan. On arrivait alors à un moment où il était possible d’engager une nouvelle énergie. Dès 2008, nous avions commencé avec les dirigeants de BD boum à réfléchir sur une manière de trouver un prolongement, un nouveau souffle. Ce projet arrivait comme la suite naturelle et logique d’un engagement fort.

Citoyen et pédagogique, BD Boum s’efforce de faire intervenir les auteurs auprès de tous les publics. Laurent Galandon et Jeanne Puchol lors d’une présentation de Vivre à en mourir (Le Lombard) dans un lycée de Blois, en novembre dernier.

Comment ont réagi les auteurs, les professionnels ?

L’an dernier, lorsque le projet a été annoncé, beaucoup d’auteurs ou d’éditeurs ont fait part de leur adhésion en insistant sur le fait que cela allait aider considérablement l’association.

La date d’ouverture officielle est arrêtée au 9 février. Après, c’est BD Boum qui gèrera de manière autonome, en fonction bien entendu d’une convention de partenariat précisant les attentes de la ville. Mais c’est l’association qui exercera en pleine autonomie. La BD est un moyen qui existe, il y a un public, on n’est pas là pour exercer un contrôle, ni pour censurer.

Le monde de la BD comme celui de l’édition est en crise. N’y a-t-il pas pour une collectivité, un risque à s’engager dans ce genre de projet ?

Financièrement, il s’agit d’un risque mesuré ! Je vous rappelle que nous restons propriétaires des locaux, l’investissement s’élève à 200 000 € environ. Quant au fonctionnement, 130 000 € par an, on reste au même niveau de subvention que celui attribué à l’association.

Certes, c’est un effort. Par conséquent, l’investissement reste modeste, à la mesure d’une grande exposition annuelle au château. On assume ce risque, modeste d’ailleurs, si l’on considère l’objet du risque, un atout supplémentaire d’attractivité et de dynamique pour la ville et nos concitoyens. C’est un pari sur l’avenir ! Notre municipalité, malgré les contraintes et les efforts qu’elle s’impose, encourage la culture ou le sport et, d’une manière générale, tout ce qui contribue à la qualité de vie du territoire.

C’est aussi, ne nous le cachons pas, un moyen de maintenir ou de faire venir des entreprises en facilitant la vie de tous, en élargissant l’offre culturelle. Dans ce cadre, si on a des porteurs de projets qui se présentent, on les accompagnera comme on le fait dans d’autres domaines. On n’attend pas de retombées directes, mais si cela permet de faire venir à Blois des touristes qui, à l’occasion de la visite de la maison de la BD passent un moment voire plus dans la ville, pourquoi pas ?

Lors du dernier BD Boum, en avant première, la place Jacques Lob, a été inaugurée en présence de l’épouse du scénariste et de quelques uns de ses amis (Jean Solé, René Pétillon...)

Êtes-vous vous même, amateur de bande dessinée ?

Eh bien non, justement ! (rires !) J’apprécie beaucoup le style ou le graphisme mais j’en lis très peu. A minima bien sûr, je lis les albums sélectionnés pour le Grand Boum, ne serait- ce que par honnêteté vis-à-vis des auteurs. Je ne me verrais pas remettre un prix à un auteur dont je n’aurais pas lu le livre ! Comme chacun, j’ai grandi avec des BD dans les mains, Astérix bien entendu ! Puis plus tard Fluide Glacial, dont j’appréciais par exemple des auteurs comme Jacques Lob, à qui nous avons rendu hommage en donnant son nom à la place donnant sur la Maison de la BD.

En dehors de cela, je ne suis pas un grand lecteur de BD ! Mais en tant qu’élu, j’ai à cœur d’accompagner tout ce qui contribue à l’épanouissement culturel, sans a priori et sans exclusion .

Quels évènements sont d’ores et déjà prévus après cette ouverture….

Cela va commencer très vite avec des expositions Yakari, puis une reprise de celle consacrée à Davodeau présentée lors du dernier BD Boum, Mana Neyestani (dessinateur iranien) et bien sûr Annie Goetzinger. Tout en conservant l’esprit caractéristique du festival.

Du point de vue de l’évolution des choses, il faut signaler aussi que la maison est proche de l’etic  [2] On peut imaginer des passerelles avec cet établissement. Je crois savoir que Bruno Genini [3]., a déjà établi des contacts. Bien que la BD ne soit pas au cœur de leur activité, on peut envisager des partenariats , tout reste à construire.

Grand Boum 2015, Annie Goetzinger a déjà les honneurs du bulletin municipal avec un clin d’oeil à l’ouverture de la Maison de la BD.

Propos recueillis par Patrice Gentilhomme

Voir en ligne : www.bdboum.com

(par Patrice Gentilhomme)

Cet article reste la propriété de son auteur et ne peut être reproduit sans son autorisation.

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Code EAN :

Maison de la bd
3 rue des Jacobins / 02 54 42 49 22
Horaires d’ouverture sur :
Le site de BD Boum

Photos : © P.G.et Blois Mag

[1Direction Régionale des Affaires Culturelles

[2Spécialisée en Communication Visuelle depuis 25 ans, cette école propose des formations dans le domaine des arts appliqués et le design graphique. Ses locaux se situent à deux pas de la Maison de la BD.

Cet établissement a déjà accueilli des Master class dont BD Boum fut partenaire.

[3Bruno Genini, directeur de BD Boum sera également en charge de la Maison de la BD

 
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