L’album s’ouvre sur l’image d’un personnage hagard, les yeux fixes, recroquevillé sur lui-même. Il se demande ce qu’il fait là, seul, devant une ouverture métallique au fond d’un immense vaisseau spatial. Pour essayer de comprendre, il va explorer cet univers froid et sombre. Se rappeler certains éléments, des données techniques, des événements passés. Et petit à petit, réaliser qu’il a une raison de se trouver dans cet endroit, probablement pour réparer quelque chose ou encore sauver l’essentiel... Mais sauver qui ? ou quoi ? On commence même à se demander si l’humanoïde qu’on nous montre est un être humain.
Matière fantôme s’ouvre ainsi, avec des pistes complexes, un seul personnage réel, des décors saisissants. Le scénariste Hugues Fléchard place d’emblée la barre haut avec cette histoire quasi messianique. Après le premier opus (alpha) beta et oméga suivront, chaque année jusqu’en 2008.
Il ne faut pas chercher ici un récit linéaire. Le premier contact avec cette matière fantôme plante le décor et nous permet de vivre les émotions du héros. Le dessin de Stéphane Douay épouse ces découvertes avec une grande souplesse. Son visage change, il passe d’un âge à un autre, son habillement évolue... L’architecture intérieure du vaisseau apparaît tantôt détaillée, tantôt suggérée, avec un noir qui domine dans les couleurs.
Une telle quête mystique liée à l’idée de survie et de destin humain évoque 2001, l’Odyssée de l’espace de Stanley Kubrick, mais aussi les grandes oeuvres de BD SF des années 70 (Moebius, Druillet...). En ce sens, Matière fantôme s’adresse d’emblée à plusieurs générations de lecteurs pour qui la bonne science-fiction s’intéresse toujours à l’humain.
(par David TAUGIS)
Cet article reste la propriété de son auteur et ne peut être reproduit sans son autorisation.