Né en 1964 dans une ville portuaire (Marseille), Chanouga utilise ses racines pour témoigner de sa passion pour les récits d’aventures maritimes. À commencer par De profundis puis avec l’épopée du marin Narcisse Pelletier, deux albums déjà publiés chez Paquet, l’auteur poursuit contre vents et marées (!) son exploration de destins singuliers à l’aune de textes de littérature maritime. Cette fois, il a choisi de s’intéresser à la jeunesse d’un auteur incontournable dans le genre : Robert Louis Stevenson.
Refusant le confort d’un avenir tout tracé au sein d’une famille d’ingénieurs prestigieux, le jeune étudiant saisit l’opportunité d’un séjour sur une île perdue au large de l’Écosse pour choisir l’écriture plutôt que l’industrie.
À la suite de ce séjour, le futur auteur de l’Ile au trésor prend la décision de rompre avec la tradition familiale, en quittant une lignée d’ingénieurs dont la réputation repose sur la grande maîtrise dans la construction de phares dans les endroits dangereux, isolés et inaccessibles. Un savoir-faire qui est à l’origine de la notoriété de la société fondée par sa famille. De son passage sur l’île d’Erraid (rebaptisée Aros par l’écrivain) il tirera une nouvelle Merry Men, publiée en 1882, traduite sept ans plus tard sous le titre les Gais compagnons.
Plus qu’une simple adaptation, Chanouga revisite cette année si particulière et si décisive dans la vie du jeune écossais, en y intégrant une balade romantique et fantasmée.
Une fois de plus, il témoigne d’une grande maîtrise dans la restitution d’ambiances marines et nocturnes. Les scènes de tempêtes y sont traitées avec grand réalisme et une grande force graphique.
Si la narration reste fidèle à une construction littéraire très inspirée, le traitement graphique renvoie pour sa part à toute une tradition des marines, genre figuratif particulièrement développé au XIXème siècle. D’autres illustrations font implicitement penser aux ambiances travaillées par certains artistes comme Turner, par exemple.
Ces choix artistiques, déjà présents dans les précédentes productions de l’auteur, confortent la puissance évocatrice et la crédibilité du propos de cet album.
En adoptant un format généreux (240 par 320 mm), la réalisation technique met en valeur ce travail original de grande qualité. La présence d’un dossier, en fin d’ouvrage remet en perspective le projet de cet auteur exigeant et talentueux et fait de cette nouveauté un objet éditorial passionnant et séduisant.
(par Patrice Gentilhomme)
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