Évidemment, l’initiative de l’éditeur Sandawe ne pouvait pas rester sans réaction. « À l’heure où l’édition indépendante est en plein désarroi, un nouveau modèle économique se profile » écrivions-nous le 18 février dernier lorsque se lançait Sandawe, le premier label francophone de bande dessinée financé par une communauté de lecteurs.
Sur les traces de Sandawe
« Un des soucis majeurs qui touche les nouveautés, nous expliquait alors Patrick Pinchart, ancien éditeur de chez Dupuis ayant créé ce label en novembre 2009, c’est le manque de visibilité dans les points de ventes, car les albums sont souvent noyés entre les séries installées, les best-sellers et les 4600 parutions annuelles. Sandawe s’appuie donc sur une communauté rassemblant tous les types d’intervenants de la bande dessinée : auteurs confirmés ou non, lecteurs, journalistes, libraires et éditeur. Les lecteurs vont pouvoir participer au financement des albums, suivront les étapes de leur création, tout en soutenant leur promotion. »
Les premiers albums étaient sortis en février 2011 et, récemment encore, deux nouveaux albums étaient financés. Un nouveau modèle économique d’édition de la BD était né.
Il s’inspirait de ce qui s’était fait dans le secteur du disque avec des labels comme Akamusic ou My Major Company. Cette dernière avait été créée par le propre fils de Jean-Jacques Goldman associé à la holding du producteur de télévision Stéphane Courbit, le producteur de Loft Story. Elle a remporté en quatre ans un joli petit succès avec le chanteur Grégoire et a signé plus de 30 artistes depuis.
En mai 2010, MMC s’était associée aux éditions XO, la machine à best-sellers éditrice de Guillaume Musso, dans le cadre de la structure MMC Books. L’idée est de proposer à la communauté d’investisseurs de MMC qui déjà finance des musiciens, de financer aussi des auteurs de livres.
Alliance avec un leader
MMC a décidé de réitérer cette manœuvre en s’alliant au leader toutes catégories du marché de la BD, Média-Participations qui contrôle les labels Dargaud, Dupuis, Le Lombard, Kana et d’autres.
« MMC cherche à internationaliser et diversifier son offre pour devenir un leader du financement participatif culturel. Travailler sur le marché de la BD nous semblait intéressant à tous les niveaux. C’est un milieu de connaisseurs, de passionnés déjà très portés sur le Web et la découverte. Nous arrivons sur ce marché avec beaucoup d’humilité et l’ambition simple de bien faire les choses » dit Michaël Goldman dans un communiqué.
« En quinze ans, le nombre de nouveaux albums de bande dessinée a été multiplié par dix. Avec près de 5 000 titres chaque année, il est devenu de plus en plus difficile pour les nouveaux auteurs de trouver leurs lecteurs. MMC BD est une formidable opportunité pour ces jeunes auteurs de rencontrer très en amont leurs premiers lecteurs et de faire découvrir leur univers. Et c’est non seulement une caisse de résonance, mais aussi un lieu d’échange avec ces lecteurs qui vont également choisir de participer à l’édition de leurs premiers albums » ajoute Claude de Saint-Vincent, directeur général de Média-Participations, validant ainsi l‘analyse faite par Patrick Pinchart et Sandawe deux ans plus tôt, espérant résoudre « la crise des tomes 1 » dont Laurent Galandon nous parlait récemment dans ces colonnes.
« Les projets bénéficiant d’une « jauge » pourront provenir de deux sources : les canaux classiques des maisons d’édition et les projets inscrits sur le site. Dans tous les cas, il s’agira de projets auxquels Dargaud, Dupuis ou Le Lombard croient, sur lesquels ils ont envie de travailler et qu’ils souhaitent défendre. Pour être édités par MMC BD, les projets devront atteindre au minimum 10 000 euros de mise. Le maximum est de 25 000 euros » dit le communiqué.
Dès le 17 octobre, neuf projets seront présentés aux investisseurs soutenus par des auteurs comme Pierre Boisserie ou Mathieu Lauffray. MMC BD s’est assuré les partenariats de Métro et de l’Association des Libraires BD.
Les propositions éditoriales sont faites par les propres éditeurs de Dargaud, de Dupuis et du Lombard. On y trouve aussi bien des BD « mangaïsantes » comme Axel Rock de Nicolas Mousty & Pierre Loyvet (Dargaud), qu’un roman graphique de Sacha Goerg, membre de la communauté Grandpapier (Le Lombard) ou un album humoristique signé par l’a comédienne et chanteuse Jeanne Balibar (Dupuis).
Une importante communauté
« Notre communauté, c’est 150.000 Personnes aujourd’hui, nous dit Sophie Pouliquen de MMC-Books, nous n’aurons pas de problème pour trouver du financement. »
Qu’est-ce qui garantit la qualité artistique du projet, finalement ? « C’est avant tout un label, ce sont des gens qui ont une compétence artistique. On n’a pas révolutionné le métier du label, on a révolutionné le système de financement » précise Sophie Pouliquen qui souligne que toutes les décisions éditoriales reposent sur les choix des éditeurs de Média-Participations.
Le joint-venture avec XO Editions a produit jusqu’à présent cinq titres en deux ans et le sixième va sortir ces jours-ci. Mais, en dépit de cette alliance, aucun best-seller à l’horizon : le Grégoire de MMC Books reste à trouver…
Il faut dire que, alors que dans le disque, l’investissement de départ est seulement de 5.000 euros, il est de 20.000 euros dans le livre. « Dans la bande dessinée, ce sera 25.000 euros » estime Sophie Pouliquen. Une « jauge » quand même bien basse.
La curiosité du lancement de ce nouveau label, c’est que, pour l’heure, Media-Participations et MMC BD communiquent alors qu’aucun site n’est disponible. Pas le moindre lien sur le communiqué... Bizarre comme lancement.
(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))
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