Un bel humaniste ce monsieur Hartog. Non seulement il recueille son neveu, dont les parents sont morts dramatiquement, mais il utilise sa fortune "à créer du beau". Quant à ses employés, tous issus de la cour des miracles : handicapés, blessés de guerre, malades divers... Même la petite nouvelle, chargée de veiller sur Peter, le neveu orphelin, sort d’un long séjour en hôpital psychiatrique. La jeune femme prend pourtant son travail avec sérieux, sans se douter des motivations réelles du patron. Qui d’ailleurs, s’absente illico pour une semaine. Comme c’est curieux...
Révéler le fond du roman de Manchette, de même que dévoiler la partition du concerto pour petits et gros calibres qui va se jouer sur une centaine de pages serait cruel pour le lecteur. Dès l’introduction de l’histoire, le chef des tueurs donne le ton : dans Ô dingos ô châteaux !, tous les personnages fuient, luttent contre le désespoir et portent en eux une violence inouïe.
Manchette semble s’amuser de les tourner en ridicule, tout en leur laissant une petite part d’humanité. Rien de tel pour ancrer les seconds rôles dans le récit. Il fait même de l’enfant un petit malin qui comprend vite le piège dont il est l’enjeu.
Si l’adaptation de Tardi semble plus sobre qu’à l’habitude (n’oublions pas qu’il a déjà adapté deux romans de Manchette), il donne un rythme parfait à l’intrigue. Son trait excelle dans la peinture de ces fracassés qui courent tous à leur perte. Un univers noir qui connaît quelques moments de franche rigolade, notamment une fusillade dans un centre commercial digne de Zombie de George A. Romero. Le livre original, sorti au début des années 70, était bien de son époque. L’album de Tardi nous prouve les que révoltes post-1968 laissent encore des traces aujourd’hui.
(par David TAUGIS)
Cet article reste la propriété de son auteur et ne peut être reproduit sans son autorisation.
Commander ce livre chez Amazon
Commander ce livre à la FNAC
Lire également :
> Le Cri du Peuple T2
> Le Petit Bleu de la Côte Ouest
> La Véritable Histoire du Soldat Inconnu
> "J’arrête Adèle Blanc-Sec" (entretien en novembre 2007)
> "A force d’adapter des livres, vous devenez de plus en plus timoré..." (entretien en septembre 2005)
> Tardi pour enseigner la souffrance et la mort
> Tardi à l’Historial de la Grande Guerre
> Destination ailleurs : la New-York de Tardi
> Les cailloux blancs de Jacques Tardi et Dominique Grange
> Tardi manifeste dans Libération en faveur de Cesare Battisti
Participez à la discussion