Embarquons pour une expédition inspirée d’une histoire vraie (celle d’Ernest Shakelton, premier grand explorateur du cercle polaire) qui nous emporte au cœur de l’Antarctique pour une immersion de plus de 250 pages.
En 1916, Arkadi a participé à une expédition d’exploration de l’Antarctique dirigée par son père, le célèbre explorateur Gordon Kentigern Oliphant, et comprenant 27 membres d’équipage. Malheureusement, la coque du brise-glace s’est fissurée à cause de la plaque de glace environnante, entraînant un naufrage progressif. Gordon a pris la décision de décharger le bateau de tout le matériel essentiel, comme les canots, les traîneaux et les instruments de mesure. Les hommes ont rapidement compris qu’ils étaient en danger, isolés à des milliers de kilomètres du monde civilisé. Ils ont atteint la première base scientifique sur une île située à 700 km de la côte. Gordon a organisé une expédition pénible sur la glace, impliquant le trajet en traîneaux tirés par des chiens jusqu’à la côte, puis en canots jusqu’à l’île la plus éloignée, et enfin, la traversée de 700 km en mer agitée pour atteindre la base scientifique.
Le lecteur est très vite emporté par cette histoire de survie dans un territoire hostile, sans contour ni couleur, où toutes les limites s’effacent. La scénariste Lou Hui Phang continue de sonder notre présence au monde en combinant une approche scientifique très documentée (qui donne un aspect très encyclopédique aux têtes de chapitres) avec une ouverture vers le monde de l’onirisme des mythes et des rêves. Elle nous invite à suivre le récit d’apprentissage d’Arkadi : écrasé par la figure paternelle, il trouvera enfin un sens à sa vie et un nouveau rapport au monde après avoir frôlé la mort. On explore ainsi des états modifiés de la conscience proche du chamanisme.
L’illustration de ce périple chaotique est très originale : avec ses somptueuses pages en couleurs directes, Benjamin Bachelier donne au récit un souffle graphique certain : son dessin peinture se fait tour à tour sensitif et immersif éclatant le gaufrier classique pour des pleines pages parfois à la limite du figuratif. Un sens du mouvement qui sait mettre en valeur le récit complexe de Lou Hui Phang sans surcharger les planches et en nous laissant une forte impression.
Une belle odyssée aux confins du monde et de la raison qu’on relit avec plaisir.
(par Stéphane GROBOST)
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Oliphant - par Loo Hui Phang et Benjamin Bachelier - Éd. Futuropolis