Par l’intermédiaire de gags de quatre cases tenant en une planche, le mangaka réinterprète les symboles religieux, artistiques et populaires qui imprègnent notre société. Dans cet univers parodique et décalé, on croise Jésus épinglé à un tableau d’insecte, les chansons des Beatles revues et corrigées ou encore le Lieutenant Columbo qui en parlera éternellement à sa femme !
Avec toute l’inventivité nécessaire et un côté ludique revendiqué, l’auteur tourne en dérision et transgresse tout ce qui peut créer les repères d’une certaine culture pop. En enchaînant des plans qui, apparemment, n’ont rien à voir entre eux, la lecture crée un véritable petit monde décalé. Chaque page prend écho quelques instants plus tard au vu de l’évolution de la situation.
En brouillant nos repères grâce à un foisonnement théâtral, à une narration qui semble sans lien et qui part dans tous les sens, l’auteur nous perd parfois mais nous surprend toujours. L’alternance entre réalisme cru et violent et agilité fantaisiste, virant dans l’absurde à l’envi, fait de ce manga un objet non identifié, véritable vent de fraîcheur.
Usamaru Furuya combine de multiples registres graphiques qui apportent une touche différente à chaque court récit. On entre dans un recueil de formes, travail stylistique touche-à-tout qui parfois ressemble un peu trop à une œuvre de fin d’étude aux Beaux-Arts. L’auteur de Litchi Hikari Club construit un « story board » pour album choral. Avec une parfaite maîtrise du rythme entre accentuation horrifique et pause voyeuriste, il tisse une trame aux motifs récurrents.
Un exercice de style qui oscille entre manipulation du lecteur, monde horrifique commun et dialogue désopilant. Grâce à quelques « combos » parfaits et à son côté sadique assumé ainsi qu’à la multiplicité des lectures graphiques et narratives offertes, cet opus est réellement une joie à goûter jusqu’à plus soif.
(par Vincent GAUTHIER)
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