L’Art contemporain est-il du foutage de gueule ? Philippe Geluck ne se pose pas la question, mais en cas d’affirmative, il répond présent. Les artistes contemporains ont affaire à un orfèvre en la matière : "Je suis un artiste et je suis contemporain, nous dit Geluck. Suis-je un artiste contemporain ? On dit qu’il y a beaucoup d’humour dans l’Art contemporain, et sur ce point quelqu’un comme Sophie Calle m’épate, il y a des choses qui sont belles et qui sont drôles. Mais il y a aussi dans l’Art contemporain des gens qui se prennent solidement au sérieux et qui ne sont pas forcément des rigolos. J’ai vu des installations un peu pompeuses avec des redites de choses qui ont été faites depuis longtemps. il y a encore des mecs maintenant qui font des monochromes blancs, ça va bien."
"Je suis un chatouilleur de mythes, poursuit l’humoriste. Honnêtement, je fais ça pour me marrer. Après, ça fait réfléchir quand même : Pourquoi j’ai ri comme un con devant ce truc-là ? Cela peut mettre des choses en perspective. Les dessins que j’ai faits et sur lesquels on marche, j’ai l’impression que cela ne s’est jamais vu avant. Cela devient un vrai tableau, dans une galerie, devant lequel les gens s’arrêtent, regardent, rigolent. Je joue avec les codes de la galerie d’art."
Irrespectueux
La démarche est hypocrite car ces parodies, c’est d’une certaine façon un moyen de dénigrer des concurrents. "Je ne moque que des grands anciens, comme Soulages qui a un certain âge. Il a 95 ans. J’essaie de me moquer de gens qui ne peuvent plus trop se défendre. Je ne me moque pas du tout des jeunes artistes musclés. Soulages, grand respect, c’est du foutage de gueule, mais de l’hommage surtout, parce que je suis bluffé par ce mec, sincèrement. Je l’ai découvert grâce à mon père quand j’étais môme. J’ai suivi ce travail pendant cinquante ans de ma vie et je reste bluffé. Ça a dû lui arriver de laisser couler une de ses toiles. Il en a ratées. D’ailleurs, quand il estime que l’une de ses toiles n’est pas digne, il la brûle. Tu te rends compte, le mec ! Je l’ai rencontré, il m’a dit qu’il aimait bien mon travail, donc, l’hommage, je peux me permettre..."
Franchement, qui achète les tableaux de Monsieur Geluck ? "Ce sont des gens vachement futés qui savent ce qu’investir veut dire ! Ils se disent, c’est encore abordable et après, cela mettra notre famille à l’abri du besoin ! Il y a des collectionneurs d’art et de BD. Je sais que Michel-Édouard Leclerc en fait partie. Il a acheté quelques pièces qui sont un petit peu le chaînon manquant entre l’art et la BD. Les collectionneurs de la BD m’achètent, même si je ne suis pas le nom de la BD qui fait le plus fantasmer les collectionneurs. Pour eux, on fait un Chat ou une photocopie, c’est la même chose, même si certains voient de la valeur artistique dans mon travail. D’autres sont des collectionneurs d’art qui trouvent quelque chose de déstabilisant dans mes tableaux. Le plus souvent, ce sont des conneries comme j’aime en dessiner en petit, mais c’est en grand et ça peut se mettre au mur d’une galerie."
Bravo la mentalité !
(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))
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Tout l’art du Chat
Jusqu’au 29 novembre 2014
Galerie Breyne & Huberty (Petits Papiers)
91, rue du faubourg Saint-Honoré
75002 Paris
Du mercredi au samedi de 11 à 19 heures
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