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Polémique autour des "Maîtres de l’univers : Révélation" : la version "woke" divise les fans

Par Jorge Sanchez le 30 juillet 2021                      Lien  
"Que le pouvoir du Crâne Ancestral soit en vous, jeunes Maîtres de l'Univers !". Musclor, l'une des plus grandes icônes de héros bourrin des années 1980, créé par la firme de jouets Mattel et décliné en figurines articulées, en comics (DC Comics, Dark Horse…) et en séries animées sur quatre décennies, vient de retrouver les écrans par le biais de Netflix, après plusieurs années de relatif silence. Réduits au rang d'œuvre secondaire, peu traduits et connus hors des États-Unis, "les Maîtres de l'Univers" ont marqué des générations d'enfants. Sauf que dans cette nouvelle série, le héros blond et testostéroné a été complètement écarté afin de plaire à la mode "woke" d'Hollywood.
Polémique autour des "Maîtres de l'univers : Révélation" : la version "woke" divise les fans
Musclor dans la version Whitman.
Musclor dans la version Sagédition. Entre Conan et G.I. Joe...

Tout commence avec un leak, une rumeur venue de l’équipe de réalisation de la nouvelle série de Netflix Les Maîtres de l’Univers : Révélation. Le 10 mars, le YouTuber spécialisé en culture geek Clownfish TV publie un tweet où il dévoile que la série censée ressusciter Musclor et son antagoniste Skeletor suit un tout autre chemin, visant à mettre de côté ces héros parmi les plus appréciés des années 1980 en faveur d’autres personnages déjà établis dans la série, afin de promouvoir une vision plus « progressiste », où la diversité serait mieux respectée. Sur les réseaux sociaux, les amateurs nostalgiques de la série se déchaînent…

Le 11 mars, Kevin Smith, le réalisateur du film Clerks, les employés modèles, proteste avec vigueur, criant au délire de "fans toxiques". En dépit de cela, les rumeurs persistent (article en anglais), amenant Smith à publier, le 28 mai, un nouveau tweet plus catégorique afin de calmer les fans qui s’inquiètent de ne plus revoir leur héros favori : « Our series is LITERALLY all about He-Man » (notre série est LITTÉRALEMENT centrée sur Musclor), martèle-t-il alors.

Puis, le 10 juin, Netflix publie son trailer pour la 1ère saison de la série, offrant aux fans tous ce qu’ils attendent : adrénaline, action brute sans retenue et personnages aussi baroques qu’absurdes (rappelons au passage que l’intention primaire de la série de 1982 était ni plus ni moins de vendre les jouets de la compagnie Mattel), au son du hit Holding Out for a Hero de Bonnie Tyler, de la pure essence rock électro des années 1980.

Les fans sont rassurés. Après tout, Kevin Smith a affirmé (article en anglais) à de multiples reprises que sa nouvelle série serait faite dans un esprit de continuité avec l’originale. Musclor fait partie avec G.I. Joe, ThunderCats, Mask, Teenage Mutant Ninja Turtles, et bien d’autres, de ces franchises créées durant l’ère Reagan où des héros musclés et souriants doivent faire face à des hordes de vilains mutants, robots ou sorciers, dont l’ambition est de détruire le monde. Dans le cas de Musclor, c’est l’iconique Skeletor avec la voix de Mark Hamill qui sert de méchant de service.

Puis vient le 23 juillet et la vérité enfin dévoilée, confirmant les pires soupçons des fans de la première heure. Longue de cinq épisodes, la première saison de Maîtres de l’Univers : Révélation tue Musclor dès le premier épisode et passe l’essentiel de son temps à suivre les aventures de Tila, Andra, Démonia, Orko et Roboto, en quête d’une nouvelle source de magie pour Eternia. En clair, les femmes ont pris le pouvoir.

Dans ce nouvel avatar, beaucoup de choses ont changé : Tila n’est plus une guerrière altruiste, fidèle à la couronne, mais une mercenaire égoïste au look androgyne. Andra n’est plus l’héroïne rousse des comics de la franchise, mais une ingénieure noire, cultivant une claire affection pour Tila. Maître d’Armes, le fidèle compagnon d’aventures de Musclor est ici un être aigri, honteux d’avoir aidé son compagnon à maintenir son identité secrète. Quant à Musclor, il fait son apparition dans le dernier épisode afin de s’excuser d’avoir sacrifié sa vie sans penser aux conséquences de ses actions…

Ces changements radicaux ont été très mal accueillis par la critique [1] et la polémique fait rage sur les réseaux sociaux. Plusieurs fans expriment nettement leur déception et plusieurs membres de l’équipe de réalisation (dont Sarah Michelle Gellar, actrice de voix de Tila, en particulier (article en anglais)), tentent de concilier la réalité de ce qui a été offert avec ce qui a été promis. Kevin Smith quant à lui a déjà commenté dans plusieurs interviews récentes la réception négative de ces spectateurs en minimisant leurs arguments et en n’hésitant pas au passage à les insulter…

Pour les observateurs de la culture geek, cette polémique a un goût de déjà vu, réplique de celle née lors de la sortie de The Last Jedi. La mode actuelle des studios d’Hollywood et de Marvel dans sa 4e phase est de récupérer autant que possible les thèmes liés au courant « woke » du moment, afin de prendre en compte les débats sociétaux, non sans un didactisme quelquefois maladroit, sinon irritant.

La question qui semble faire consensus est simplement : pourquoi ? Pourquoi Kevin Smith a-t-il menti sur la véritable nature de sa série ? Pourquoi les personnages masculins, favoris des fans d’antan, sont-ils aujourd’hui rabaissés avec des phrases telles que « Musclor n’était qu’un lèche-bottes dont on vantait les mérites », exprimée par Démonia ? Si la franchise Les Maîtres de l’univers incluait déjà She-Ra, un personnage féminin beaucoup plus apte à incarner les aspirations du woke, pourquoi ne l’ont-ils pas utilisée ? Pourquoi ont-ils changé la couleur de peau de deux personnages majeurs des comics (Andra et Greyskull) au lieu d’en créer d’autres ?

Ces dernières années, nous avons vu bon nombre de grandes franchises, comme Dr. Who, Star Trek, Ghostbusters, etc., subir des changements inopinés. Les héros inspirés par la mythologie classique, comme Musclor, étaient censés représenter un idéal d’humanité optimiste et bienveillant, afin de nous inviter à exprimer tout notre potentiel et non pas exprimer un militantisme contreproductif, aussi peu créatif que moralisateur.

(par Jorge Sanchez)

Cet article reste la propriété de son auteur et ne peut être reproduit sans son autorisation.

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