Les enfants et la politique ? Vaste domaine à explorer, pour la sociologue Julie Pagis. Elle étudie ce rapport en s’immergeant dans deux classes d’une même école de Seine-Saint Denis : CE1 et CM2.
Le contexte : la présidentielle française de 2017. Sur tous les sujets, les enfants démarrent au quart de tour, et rien de les arrête, même s’il s’agit de commenter simplement une photo. Plusieurs séances défilent ainsi sous le crayon de Lisa Mandel, désormais familière de l’exercice, d’autant qu’elle co-dirige la collection sociorama.
Différence notable avec les autres volumes de la série, cet album à la joyeuse effervescence se cantonne à retranscrire des scènes vécues. L’analyse reste en retrait, lors de rares passages sociologiques qui ont le mérite d’une grande clarté malgré leur brièveté. En choisissant de ne pas traduire les termes employés par les enfants, en laissant les classes en liberté quasi totale (seules quelques insultes un peu appuyées sont censurées), les autrices dévoilent les myriades de questions qui taraudent les chers bambins.
Évidemment, l’avis des parents prend une importance capitale dans leurs "opinions", mais le discours s’attache aussi à des détails concrets qui laissent pantois : beau, propre, gentil... Mais tout cela ne dépend pas que de leur maturité, le conditionnement adulte y est pour beaucoup. Et les passages les plus croustillants sont justement ceux qui s’approchent des conversations de "grands".
L’humour de cette Pré-zizi-dentielle arrive souvent par surprise, et dans les réparties fulgurantes que les enfants s’échangent. Mais Lisa Mandel met aussi son grain de sel en illustrant des expressions imagées entre deux cases. Autre très bonne idée : l’exercice du débat présidentiel est mis en image avec les visages (caricaturés) des vrais candidats, mais bien sûr le langage des enfants !
Derrière les rires bienfaisants qu’apporte ce réjouissant opus, on peut tout de même percevoir des réalités plus sombres : le racisme sous-tend la plupart des conversations, le chômage fait partie du quotidien, et la question du logement rassemble tous les écoliers.
Qu’ils se chamaillent sur des sujets tendus ou qu’ils jubilent de railler les candidat(e)s, les enfants confirment deux principes essentiels : à l’école on apprend plein de choses et aussi à respecter autrui.
(par David TAUGIS)
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