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Prix Bédéis Causa 2016 : vibrant hommage au collectif Chiendent

Par Marianne St-Jacques le 17 avril 2016                      Lien  
La soirée de la remise des Prix du vingt-neuvième édition du Festival de la BD francophone de Québec était placé sous le signe de l'émotion et du patrimoine du Québec. Analyse en détail et interviews !

C’est sous le signe de l’émotion que s’est déroulée l’édition 2016 de la remise des prix « Bédéis Causa », ce samedi 16 avril 2016, au Musée de la civilisation de Québec, dans le cadre du 29e FBDFQ. Près de 50 ans après le printemps de la bande dessinée québécoise, le Festival de la BD francophone de Québec a en effet rendu hommage au groupe Chiendent.

Composé du scénariste Claude Haeffely et des illustrateurs Marc-Antoine Nadeau, André Montpetit et Michel Fortier, rappelons que le groupe Chiendent a marqué le printemps de la BD québécoise, à la fin des années 1960. En publiant des œuvres d’avant-garde, le collectif a lancé la (re)naissance de la bande dessinée québécoise moderne.

Les activités du groupe ont toutefois été éphémères. Devant l’absence de débouchés pour la Neuvième art, les membres de Chiendent sont retournés à leurs pratiques originelles, la poésie pour Haeffely et les arts visuels pour le reste du collectif. « Il n’y avait pas de suite, explique Marc-Antoine Nadeau. Moi, je suis resté graveur toute ma vie. Et puis il n’y a plus de galeries de gravures. J’ai donc arrêté de publier des gravures depuis environ deux ans. La bande dessinée à cette époque, on n’avait pas d’éditeurs. Le seul repli qu’on avait, c’était les journaux. Pour moi, c’était Québec Presse. C’était dans les années 1960. À l’époque, il n’y avait pas beaucoup de choses. L’Expo 67 a ouvert l’esprit des gens. Après cela, il y a eu un décalage. La BD va reprendre en 1974, 1975 et là, ce sera plus populaire. C’est un peu triste, mais c’était ça. Un coup d’épée dans l’eau, quoi. »

Visiblement ému, Marc-Antoine Nadeau est venu accepter le prix Albert-Chartier au nom du collectif devant une foule admirative. Celui-ci ne s’attendait pas à une telle reconnaissance : « Après tant d’années où on a fait ces travaux qui s’inscrivaient dans notre vie quotidienne, que des gens y prêtent attention… Je suis surpris, je suis étonné, et ça me donne le goût de vivre ! (…) Je continue à faire de la peinture, qui est beaucoup influencée par la bande dessinée. »

Prix Bédéis Causa 2016 : vibrant hommage au collectif Chiendent
Marc-Antoine Nadeau du groupe Chiendent et Sylvain Lemay, auteur du livre Du Chiendent dans le Printemps
Photo : Marianne St-Jacques

Le prix Albert-Chartier est décerné annuellement à un individu ou un organisme ayant marqué le monde de la bande dessinée francophone au Québec. La remise de ce prix coïncide d’ailleurs avec la parution du livre Du Chiendent dans le Printemps de Sylvain Lemay (Éditions Mém9ire), dont le lancement avait lieu lors du Festival de la BD francophone de Québec, ainsi que la projection de Sur les traces d’Arthur, documentaire sur l’œuvre d’André Montpetit réalisé par Saël Lacroix, également présenté dans le cadre du FBDFQ.

Couronnement et fin de cycle pour Promise

Le récipiendaire du Grand prix de la Ville de Québec, Mikaël, ne pouvait demander mieux. « Incubus », le troisième tome de sa série Promise (scénarisée par Thierry Lamy, Glénat Québec), a remporté les honneurs pour une deuxième année d’affilée. Le lauréat n’a pas caché sa surprise : « C’est une belle reconnaissance du milieu de la bande dessinée, à Québec, et au Québec pour cette série. (…) Je suis très surpris car la compétition dans cette catégorie était très serrée, avec de belles productions comme "Paul dans le Nord", ou "La Petite Patrie" dessinée par Julie Rocheleau. Je ne m’y attendais vraiment pas ! Je suis très content. »

S’il s’agit d’une fin de cycle heureuse pour le dessinateur, il en est tout autre pour les personnages de ce western fantastique aux atmosphères glauques : « L’image de l’ensemble de la série, sur les trois tomes, c’est une montée en puissance vers l’horreur. À chaque tome, on passe à un cran supplémentaire dans l’angoisse, dans l’horreur, dans la tension permanente que vivent les villageois. On a commencé tranquillement et on finit dans l’Apocalypse. »

Mikaël, Grand prix de la Ville de Québec 2016, lors de son discours de remerciement
Photo : Marianne St-Jacques

Avec la fin de la série Promise, Mikaël se consacre désormais à Giant, un diptyque en solo qui raconte la vie des ouvriers irlandais œuvrant à la construction du Rockerfeller Center de New York, lors de la Grande Dépression, en 1932 : « On voit vraiment le côté humain des immigrants de cette époque-là, des "célibataires géographiques", c’est-à-dire ces ouvriers qui quittaient leur pays pour trouver du travail, et qui laissaient la famille au pays d’origine, le temps de gagner assez d’argent pour la faire venir. Je recentre vraiment sur l’humain, sans fantastique, angoisse ou terreur qui étaient le lot des trois tomes de "Promise". » Un premier album doit sortir en janvier 2017 aux éditions Dargaud.

Un premier prix Jacques-Hurtubise

La remise des prix Bédéis Causa a également l’occasion de remettre le tout premier prix Jacques-Hurtubise, créé en mémoire du créateur du Sombre vilain et co-fondateur de la revue CROC. Ce prix, qui récompense les auteurs émergents, a été décerné à Alexis Giroux. Le lauréat recevra une bourse de 1000$ afin de réaliser son projet Bras de fer.

Alexis Giroux reçoit le prix Jacques-Hurtubise des mains d’Hélène Fleury
Photo : Marianne St-Jacques

Alexis Giroux a reçu son prix des mains d’Hélène Fleury, co-fondatrice du magazine CROC et ancienne conjointe de Jacques Hurtubise : « L’idée est venue à la suite d’un mauvais événement, le décès de Jacques, au mois de décembre. Un infarctus foudroyant à 65 ans. Jacques s’apprêtait à reprendre "Le Sombre vilain", le personnage qu’il a créé dans les années 1970. (…) Thomas-Louis Côté (Directeur général du FBDFQ) et les gens du Festival de la BD francophone de Québec ont décidé de rendre hommage à Jacques. Et quoi de mieux que de créer une bourse pour aider un jeune dessinateur à publier sa première œuvre. »

Hélène Fleury a également profité de sa tribune pour rappeler que la bande dessinée québécoise était une cause « belle et noble » : « Toutes les petites graines qu’on a semées donnent quelque chose. (…) Le magazine CROC a donné, pour l’une des premières fois, une façon très large de diffuser la bande dessinée. On a vendu jusqu’à 100 000 copies papier par mois. C’est énorme ! Les gens lisaient de la bande dessinée québécoise. Celle-ci a été démocratisée au maximum. Avant, c’était davantage des chasses gardées pour les fans. Avec CROC, ça a pris une dimension provinciale. »

Prix Bédéis Causa 2016 – Les lauréats :

- Prix Réal-Fillion (auteur, illustrateur ou scénariste québécois s’étant le plus illustré avec son premier album professionnel) : Mat Ordog, Les Pieds palmés T1 : Les terres arides, Michel Quintin

- Prix Albéric-Bourgeois (meilleur album de langue française publié à l’étranger par un auteur, dessinateur ou scénariste québécois) : Delaf et Dubuc, Les Nombrils T7 : Un Bonheur presque parfait, Dupuis

- Grand prix de la Ville de Québec (meilleur album de langue française publié au Québec) : Mikaël, Promise T3 : Incubus, Glénat Québec. Scénario de Thierry Lamy.

- Prix Maurice-Petitdidier (coup de cœur du jury pour un album francophone publié à l’étranger) :Cyril Pedrosa, Les Équinoxes, Dupuis

- Prix Traduction : Scott McCloud, Le Sculpteur, Rue de Sèvres

- Prix Albert-Chartier (prix hommage) : collectif Chiendent (voir ci-dessus)

- Prix Jacques-Hurtubise (bourse de 1000$ remis à un auteur émergent) : Alexis Giroux pour son projet Bras de fer (voir ci-dessus)

Les lauréats des prix Bédéis Causa 2016
Photo : Marianne St-Jacques

(par Marianne St-Jacques)

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