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Raymond Khoury : « Je me suis interrogé sur l’origine de la chrétienté pour écrire le Dernier Templier ».

Par Nicolas Anspach le 18 avril 2009                      Lien  
Les éditions Dargaud publient le premier tome du {Dernier templier}, une adaptation d’un roman de {{Raymond Khoury}} réalisée par le dessinateur brésilien {{Miguel Lalor}}. L’écrivain a supervisé lui-même la réalisation de cette BD. Les auteurs nous parlent de ce thriller ésotérique qui s’est vendu à trois millions d’exemplaires dans le monde.

Lors d’une soirée organisée au Metropolitan Museum de New-York pour le vernissage d’une exposition consacrée aux trésors du Vatican, une poignée de cavaliers en costume de templier sèment le chaos et le désarroi dans les salles. Les templiers n’hésitent pas à décapiter à coups d’épée les gardes. Ils dérobent différents objets exposés. Tess, une archéologue présente ce soir-là, et Sean Reilly, un agent du FBI, mènent ensemble l’enquête pour découvrir l’identité de ces mystérieux templiers. Ils ne se doutent pas que la disparition de ces objets provoque l’effroi du Vatican.
Miguel Lalor a réussi le tour de force de conserver dans cette adaptation le rythme haletant de son histoire. Rencontre.


Raymond Khoury, votre roman «  Le dernier Templier » est u énorme succès. Pourquoi avoir souhaité adapter ce livre en bande dessinée et en assumer vous-même la promotion ?

RK : Pour la simple raison que je suis un amateur de bande dessinée depuis mon enfance. Au Liban, en sortant de l’école, le jeudi après-midi, je me ruais sur le Spirou de la semaine ! Je me souviens encore de l’impatience que j’éprouvais en attendant les numéros spéciaux pour Noël ou pour Pâques. Sans compter les mini-récits à découper qui étaient inclus au journal. Puis, j’ai commencé à acheter des albums. C’était difficile pour moi d’avoir accès aux BD que j’appréciais ou aux fanzines de Michel Deligne. Lorsque mon père venait à Bruxelles ou à Paris pour ses affaires, je lui demandais de passer dans différentes bouquineries pour m’acheter des albums de Jean Valhardi et de Jerry Spring. Il me ramenait ces livres et les bouquinistes s’interrogeaient sur la passion de ce petit gosse Libanais qui recherchait ces livres tellement particuliers et souvent épuisés.

Vous avez continué à lire des BD ?

RK : Oui. D’ailleurs, bien avant de réaliser « Le dernier Templier » en BD, j’explorai la possibilité d’adapter certaines séries à Hollywood. Comme je collectionnais les bandes dessinées, lorsqu’une histoire me plaisait et que j’y voyais un potentiel pour le cinéma, je venais à Paris pour négocier les droits. Je repartais à Hollywood pour présenter aux studios ces idées d’adaptation. Mais il y a très peu de séries qui m’aient donné envie de m’investir totalement dans un projet de film.

Raymond Khoury : « Je me suis interrogé sur l'origine de la chrétienté pour écrire le Dernier Templier ».
Extrait du "Dernier Templier"

Miguel Lalor, ce projet d’adaptation en bande dessinée du « Dernier Templier » est votre idée ?

ML : Dargaud m’avait proposé différents projets, dont l’adaptation de ce roman. Je l’ai lu et j’ai ressenti que ce livre demandait à être transposé en BD. Il y avait du mystère, de l’action, du mouvement, du drame… Le plat était extrêmement bien cuisiné. J’ai dessiné deux planches d’essai qui ont été acceptées par l’éditeur et par Raymond.

RK : J’avais envoyé le roman à des maisons d’édition de bande dessinée lorsque la version française a été publiée. Le projet à traîné. Par hasard, j’ai rencontré le directeur de Dargaud France, Jean-Christophe Delpierre. Il m’a poussé à publier cette histoire chez lui. Mais je n’étais pas pressé ! Il m’était important de trouver la bonne personne pour réaliser l’adaptation et la dessiner. J’avais écrit la première mouture de ce scénario en 1995. J’ai appris à être patient (rires). On m’a proposé différents dessinateurs qui ne me convenaient pas. J’avais aimé leur travail, mais je n’avais pas été touché au plus profond de moi par leur style. Dargaud m’a envoyé un album de Myrkos et les deux planches d’essai de Miguel. J’ai directement perçu qu’on tenait le bon artiste pour ce projet.

Extrait du "Dernier Templier"

Une adaptation en quatre épisodes du même roman a été diffusée en janvier dernier sur la chaîne américaine NBC. Ceux-ci seront probablement diffusés sur M6 (en France) et sur RTL-TVI (en Belgique)

RK : Oui. L’adaptation en bande dessinée a d’ailleurs commencé avant que le casting de cette série ne soit établi. J’ai visionné dix minutes de ces téléfilms. Miguel ne les a pas encore vus. Je ne me suis pas impliqué dans ce projet. Je connais trop les milieux du cinéma pour savoir qu’il y allait avoir beaucoup trop de compromis avec les producteurs et le réalisateur. Je leur ai vendu les droits et j’espère que le téléfilm aura du succès. Par contre, j’ai voulu beaucoup plus m’investir dans l’adaptation en BD.

Extrait du "Dernier Templier"

Miguel, était-ce un exercice difficile de réaliser l’adaptation ?

ML : J’ai essayé d’être le plus fidèle possible au livre et de respecter l’essentiel des éléments du puzzle qui forme l’intrigue. Je me suis donné la liberté de changer quelques détails. La bande dessinée possède son propre langage et je n’avais que quarante-six planches pour raconter une partie d’un livre. Il fallait donc faire des choix. Raymond a participé à cette réflexion. C’était la première fois que j’écrivais un scénario, en français qui plus est ! Heureusement, ce roman était très visuel. Les images me venaient naturellement en tête.

RK : La bande dessinée est assez fidèle au livre. Il m’était important que les lecteurs comprennent la logique des personnages. Il a fallu prendre quelques raccourcis pour montrer certaines scènes de manière plus visuelle !

Les thèmes que vous abordez dans ce récit l’ont déjà été dans d’autres livres ou bandes dessinées. Mais votre assaisonnement fait le charme de cette fiction et la force de l’intrigue…

RK : Absolument ! J’ai rédigé la première mouture de ce récit en 1995. Il était destiné au cinéma. C’était mon troisième projet. Les deux précédents auraient dû être des films plus personnels. J’adore les films épiques et ceux qui me font rêver de part leur histoire fabuleuse. J’avais envie d’écrire une histoire dans cette veine, à la Steven Spielberg. Un ami m’a parlé des Templiers. Je ne connaissais pas du tout cette période. J’y ai découvert un monde fascinant, rempli de légendes, de mythes et de possibilités narratives. Il y avait tout les ingrédients pour écrire un grand thriller pour le cinéma ! Je voulais y greffer des thèmes plus personnels, comme la religion. Je viens d’un pays où les gens se sont tués de nombreuses années pour la religion, sans vraiment connaître l’origine de ces guerres. Avant l’an 2000, j’ai eu une offre d’un gros éditeur aux États-Unis pour transformer mon scénario en roman. Il me demandait d’enlever toutes les évocations à la religion. Le trésor des templiers devaient n’être que de l’or et des joyaux. Cela enlevait tous le sens de mon histoire. J’ai refusé. Cette histoire avait tellement d’importance à mes yeux que je me sentais mal à l’aise rien qu’à l’idée de la modifier. Je m’étais beaucoup questionné sur les origines de la Chrétienté. Ce récit n’est pas qu’une chasse au trésor. Il y a un vrai sens, de vrais thèmes. À l’époque, ceux-ci n’étaient pas abordés dans les livres. Le Da Vinci Code n’était pas encore publié. J’ai commencé à écrire le roman en 2002 et il n’a pas été accepté tout de suite.
Cette histoire a subi un long cheminement avant de devenir un roman. Mais le scénario, écrit dans les années 1990, a permis à ma carrière de démarrer. Un producteur anglais, qui venait de financer Quatre Mariages et un enterrement, a découvert mon scénario. Il ne l’a pas produit car il demandait trop d’argent pour le réaliser. En plus, la problématique religieuse risquait d’offenser un certain public. Mais pendant trois ans, j’ai travaillé pour eux sur des scénarios qui n’ont pas été tournés…

Extrait du "Dernier Templier"

Miguel, était-ce compliqué de passer d’une série historique, Myrkos, à une histoire réaliste contemporaine ?

ML : C’était un challenge ! Dans Myrkos, je baignais dans un certain confort car je suis un passionné d’histoire. Le dernier Templier a été l’occasion de bousculer mes certitudes et de me remettre en question. Ce défi m’a demandé énormément de travail. Je ne pouvais pas tricher avec mes dessins. Tout le monde connaît New-York, ne fut-ce que par les films ou les téléfilms. Dans Myrkos, je pouvais prendre quelques libertés pour les dessins représentant des châteaux ou des armures.
Finalement, j’ai pris beaucoup de plaisir à dessiner New-York en étant soucieux des détails. J’ai un côté névrotique qui me pousse à créer des univers les plus réels possible. Il faut que les lecteurs sentent que les personnages sont vivants. Cela passe par une série de détails, de clinq d’yeux.

« Le dernier Templier » va être adapté en combien d’albums ?

ML : Quatre.

RK : Nous travaillons déjà sur le deuxième album. Nous avons déjà l’idée d’adapter un autre de mes romans pour un second cycle. Une bande dessinée représente un an de la vie de Miguel. Pour ma part, j’écris un roman en un an et demi. Mes livres traitent de grands thèmes (la religion, la longévité de la vie, la réincarnation, etc.) et me demandent beaucoup de recherches. Si chaque roman peut être adapté en quatre albums de BD, Miguel va avoir du travail. D’autant que je prends de l’avance !

Miguel Lalor & Raymond Khoury
Photo (c) Nicolas Anspach

(par Nicolas Anspach)

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