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Renaud de Heyn : "Les capacités de communication de la scientologie sont redoutables"

Par Christian MISSIA DIO le 28 septembre 2013                      Lien  
Dans L'Évadé de la secte, Renaud de Heyn nous raconte l'histoire vraie de Roger Gonnet, un ancien consultant en entreprise qui fut l'un des scientologues les plus actifs de France avant de se détourner du mouvement et d'en devenir l'un de ses plus virulents détracteurs...
Renaud de Heyn : "Les capacités de communication de la scientologie sont redoutables"
Revue XXI n°23 - été 2013
Vous pouvez retrouver ce reportage BD dans ce numéro

Qu’est ce qui vous a poussé à faire ce reportage en BD sur la scientologie ?

J’ai un ami qui travaille à l’Observatoire des sectes de Belgique et qui est en charge du dossier de la scientologie depuis quelques années. Il m’en parlait régulièrement, mais je ne parvenais pas à comprendre ce qu’offrait la scientologie. Quelle était leur croyance d’une part, puisqu’elle se revendique comme religion, mais aussi qu’est-ce qu’y trouvaient ses adeptes ? C’est alors que j’ai décidé d’aborder la question par le biais du reportage en bande dessinée.

Que retenez vous de cette expérience ?

La puissance des techniques de manipulations mentales. À quel point on peut détruire les gens en leur faisant miroiter un peu de mieux-être en échange d’argent. Mais ce n’est pas que le portefeuille des adeptes qui est vidé, c’est aussi leur esprit.

Quelques extraits de l’Evadé de la secte
Renaud de Heyn (c) Revue XXI

Qu’est ce qui vous a le plus frappé chez les personnes adeptes de la scientologie, qu’est-ce qui les singularise ?

Il n’y a pas de trait de caractère particulier pour définir un adepte potentiel de la scientologie. N’importe qui, dans un moment de fragilité, peut se faire piéger. Les techniques de manipulation mentale de la scientologie sont extrêmement développées et, pour peu qu’on mette un doigt dans l’engrenage, il faut une très grande force de volonté pour s’en dégager. Roger Gonnet, l’ancien adepte dont je raconte l’histoire, m’a dit qu’il lui avait fallu une dizaine d’années pour retrouver son esprit critique, après les 10 ans qu’il a passés dans la secte.

C’est difficile à résumer, d’autant que je l’explique plus en détails dans le reportage, mais à force de « cours », on enlève leurs points de repères aux adeptes, on les manipule à l’aide de leviers psychologiques puissants, tels que leurs points faibles, leurs traumatismes passés qui sont révélés dès le début, en faisant miroiter une rédemption, un bien-être toujours plus proche, mais au final de plus en plus inaccessible, de nouvelles capacités, le tout en échange de cours de plus en plus chers…

Les adeptes sont isolés de leur entourage, leurs seuls points de repères deviennent ceux que la scientologie leur donne, ils ne fréquentent plus que des scientologues et leurs seuls contacts avec le monde extérieur est dans une perspective prosélyte.

Comment se fait-il que Ron Hubbard n’ait pas été démasqué plus tôt ? C’est un romancier qui se faisait passer pour un scientifique.

Lorsqu’il a écrit La Dianétique, l’espèce de "Bible" de la scientologie, il a présenté son ouvrage comme le fruit de longues recherches scientifiques sur le mental, mais sans justifier aucune de ses assertions, ni citer aucune de ses sources, et en présentant les psychiatres comme des dangers publics. Il se présentait comme un docteur en physique nucléaire, un grand explorateur, un héros de guerre… Il a fallu qu’un adepte trouve un jour ses carnets intimes et travaille avec le journaliste Russel Miller à la biographie de Ron Hubbard « Le gourou démasqué », publiée en 1987, pour que la vérité sur ses innombrables mensonges soit révélée.

Selon vous, pourquoi la scientologie continue-t-elle à faire des adeptes malgré le son image sulfureuse ?

Son image est sulfureuse lorsqu’on parle de ses escroqueries, lorsqu’elle doit se défendre devant les tribunaux pour association de malfaiteurs comme aujourd’hui en Belgique, ou récemment en France, où elle a été condamnée. Mais ses capacités de communication sont redoutables. La scientologie est riche et elle utilise une grande partie de son argent à défendre son image de religion persécutée. Quelques stars de Hollywood : Tom Cruise, John Travolta et Jennifer Lopez sont des scientologues notoires. Les nombreux dons d’argent qu’il a fait en faveur de la scientologie en 2009 font que Will Smith (grand ami de Tom Cruise) est aussi soupçonné d’en faire partie, malgré ses démentis.

Ces stars sont utilisées comme image de marque. La scientologie a créé des centres de désintoxication, lancé une campagne anti-drogue, des œuvres de bienfaisances... Ce sont autant de couvertures pour recruter de nouveaux adeptes, tout en affichant de bonnes intentions.

Elle effraie aussi tous ceux qui cherchent à la critiquer, en particulier les anciens adeptes, à coup d’intimidation, de procès et de harcèlements. Mais malgré cela, aujourd’hui, quoiqu’elle en dise et même si elle est toujours dangereuse, la scientologie est, je pense, en perte de vitesse.

(par Christian MISSIA DIO)

Cet article reste la propriété de son auteur et ne peut être reproduit sans son autorisation.

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