Un autre point fort de ces rencontres est la représentativité des artistes féminines qui sonne comme une évidence. Près d’un artiste invité sur deux est une femme.
Au 1er étage du centre Una Volta, je m’arrête sur l’album Les Quatre Détours de Song-Jian (Ed. de la Cerise) conçu par Guillaume Trouillard et Alex Chauvel, donné à voir dans sa version originale. On découvre un travail remarquable à la vue des quatre planches rectangulaires, travaillées et découpées à l’instar des rouleaux traditionnels de l’Empire du Milieu. Guillaume Trouillard a brillamment revisité l’art pictural traditionnel chinois en travaillant un décor minéral aux montagnes bleutées. Un hommage original à la philosophie taoïste et à la peinture chinoise.
À deux pas du Centre Una Volta, la Galerie Noir et Blanc expose les planches originales de trois artistes aux parcours éclectiques qui ont participé au Prix des lycéens. On s’abîme dans le dessin original empreint de poésie des Oiseaux ne se retournent pas de Nadia Nakhlé (Ed.Delcourt), la lauréate du prix 2021. Un album qui traite du parcours douloureux des migrants et de la souffrance de l’exil.
On s’arrête sur les très belles planches en noir et blanc du Detection Club de Jean Harambat (Ed. Dargaud), un album érudit sur les codes du genre policier. On découvre l’injustice dont ont été victimes les ouvrières américaines qui ont travaillé au contact du radium, dénoncée par l’autrice Cy dans un album percutant, Radium Girls (Ed. Glénat).
BD Bastia met également en lumière l’illustration avec l’atelier de sérigraphie chapeauté par le "drozophile" suisse Christian Humbert-Droz [1] et son équipe. Un atelier qui se transforme dès le matin en ruche avec un va-et-vient incessant d’enfants et de curieux venus s’initier à cette technique popularisée notamment par le pop art.
La bande dessinée se décline aussi en spectacle vivant. Gaëtan Dorémus et Philippe Lechermeier proposent une lecture dessinée et interactive, The Till Show, amusant work in progress autour du personnage médiéval Til Eulenspiegel (Till l’Espiègle) qui montre les étapes de la collaboration entre illustrateur et écrivain, auquel le spectateur est invité à participer. Jubilatoire !
Dans le cadre de ces festivités, l’illustrateur, plasticien et musicien Yann Le Borgne a réalisé une œuvre originale protéiforme qui se décline sous la forme d’un album, CD et spectacle, un Space Opera présenté pour la première fois au public dans le cadre du festival. À noter, la performance de Christian Humbert-Droz qui sérigraphie en direct sur une toile géante.
Cet événement annuel est le fruit d’un travail mené par la Directrice du Centre culturel Una Volta, Juana Macari. Merci également à l’équipe qui œuvre à ses côtés. On reviendra !
Voir en ligne : 28e rencontres de la BD et de l’illustration à Bastia
(par Nadine RIU)
Cet article reste la propriété de son auteur et ne peut être reproduit sans son autorisation.
Lire également :
"Les Oiseaux ne se retournent pas" de Nadia Nakhlé : une BD, un spectacle et un film un peu contratriés par le confinement.
Radium Girls : une page oubliée de l’Histoire
Le Détection Club : fable moderne et polar admirablement désuet !
"Soleil mécanique" de Łukasz Wojciechowski (Éditions çà et là) : l’architecture idéale à tout prix
Ville nouvelle - Par Łukasz Wojciechowski (trad. A. Stankiewicz) - Éditions çà et là
"Les Quatre Détours de Song Jiang" (Les Éditions de la Cerise) : le voyage imaginaire d’Alex Chauvel et Guillaume Trouillard dans l’Empire du Milieu
"L’Alcazar" de Simon Lamouret (Sarbacane) : une immersion dans la société indienne
"Citéville" / "Citéruine" : le don de double vue de Jérôme Dubois
La Maison de l’architecte polonais et de sa femme algérienne restée au pays - Par Jacques Bablon & Édith Chambon - Éd. Actes Sud BD
[1] Christian Humbert-Droz a publié le premier album de Camille Jourdy, Une Araignée, des tagliatelles et au lit, tu parles d’une vie !