Robin Année Un - Collectif (Trad. Mathieu Auverdin) - Urban Comics

Avant le splendide, mais inachevé, All-Star Batman and Robin, the Boy Wonder, de Frank Miller et Jim Lee, cet Année Un consacré à Robin revient sur l’entrée en scène du jeune prodige aux côtés du Chevalier noir. Deux récits se proposent d’en narrer le détail.

Le premier, un épisode spécial par Bruce Canwell et Lee Weeks, raconte comment la nuit d’initiation de Robin tourne à la catastrophe, des caïds de la ville s’invitant à la fête. Dans le second, devenu l’acolyte de Batman, Robin fait ses armes et affronte ses premiers vilains, passant d’un sentiment de toute puissance à l’appréhension de ses limites.

Si la première histoire, honnête, permet de mettre en scène l’officialisation du personnage, c’est bien le long Année Un de Chuck Dixon, Scott Beatty et Javier Pulido qui fait de ce volume un titre d’importance. À l’euphorie des deux encapés, heureux de s’être trouvés mutuellement, répondent le scepticisme d’Alfred, dont le monologue conduit une part de la narration, la surprise et les mises en garde de Gordon, l’effarement du Dr Thompkins.

La folie de Batman prend un nouveau visage pour Gordon

© DC Comics

Car tandis que Robin se voit comme un super-héros, aux yeux de ceux qu’il côtoie il n’en demeure pas moins, avant tout, un gosse. Un gamin que Batman embarque dans sa folle et vaine croisade contre le crime, dans sa guerre contre les monstres, avec tous les risques, évidents, que cela comporte.

Rappel à la raison autant que rappel à la réalité, ce Année Un fait le deuil d’une certaine complicité entre les deux comparses. La difficulté était de poser le dynamique duo, appelé à devenir pérenne, tout en revenant sur l’idéalisation dont fait l’objet ce couple, la mythification de sa constitution.

C’est ainsi presque logiquement, dans cette école du désenchantement que propose cette aventure, qu’intervient Double-Face. Incarnant symboliquement à lui seul une sorte de renversement dialectique que mime le cheminement de nos héros, son implication dans l’intrigue se fait totale. C’est par lui que Batman et Robin passent de l’enthousiasme au renoncement, du rêve et la réalité.

Robin tombé dans le piège de Double-Face

© DC Comics

Elle culmine à travers un dilemme auquel Robin se trouve soumis et qui constitue la pierre angulaire du récit, son point de rupture tout autant que de bascule. Cœur névralgique de l’histoire, cette célèbre scène qui met aux prises Robin avec Harvey Dent conduit le jeune prodige à prendre la mesure de ce qu’implique devenir Robin, à peser les mots comme on pèse la mort et la vie, à accepter de disparaître pour espérer renaître.

Récit d’apprentissage des Âges Sombres, ce Robin - Année Un, malgré un dénouement plus anecdotique, marque durablement l’imagination comme il hante désormais l’imaginaire du personnage.

Du sommet à la chute pour mieux renaître : la trajectoire du volume est limpide et façonne une lente et douloureuse initiation

© DC Comics