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Rubén Pellejero (Loup de pluie) : "La couleur est aussi importante que le crayon et l’encre."

Par Charles-Louis Detournay le 29 octobre 2012                      Lien  
Jean Dufaux revient au western, plus de 25 ans après Melly Brown dessiné par Musquera. Mais dans "Loup de Pluie", Pellejero confère au récit une puissance dramatique qui nous plonge dans ces espaces sauvages où la brutalité de l'homme reste incandescente comme un tapis de lave...

Comment avez-vous été amené à rencontrer Jean Dufaux ?

Rubén Pellejero (Loup de pluie) : "La couleur est aussi importante que le crayon et l'encre."J’ai eu l’occasion de parler avec Jean une première fois pendant le festival de Montreuil-Bellay. Puis nous nous sommes revus lors du Salon BD de Barcelone. Yves Schlirf, éditeur responsable de Dargaud Benelux connaissait très bien mes travaux antérieurs. Il m’a offert la possibilité de travailler pour cette maison. Ce que j’ai accepté, mais il fallait encore trouver ce que nous allions réaliser. Un autre jour, en présence de Jean, il m’a dit d’une façon très simple : Aimerais-tu dessiner un western, Rubén ?" Dans un premier moment, je fus surpris, mais dans mon for intérieur, je me suis dis : "Waouh !, un western ! Et avec Dufaux !" Comment refuser ?

Outre le fait de travailler avec Dufaux, qu’est-ce qui vous intéresse dans le western ?

Le western a une importance très forte dans ma carrière de dessinateur, car dans mes débuts de dessinateur, j’ai réalisé des petites histoires de ce genre pour une revue italienne, Il monello. Et depuis toujours, j’apprécie ce genre, autant au cinéma, qu’au travers des grands dessinateurs BD du genre : les Argentins (Breccia, Salinas ; les Italiens (Ivo Milazzo, Renzo Calegari, Bonilauri) et le grand maître Giraud. Dès lors, avec cette occasion de repartir sur le western avec une maturité que je n’avais pas lors de mes premiers travaux, impossible de ne pas sauter à califourchon sur le projet !

Les histoires de Jean Dufaux possèdent souvent une ambiance particulière. Qu’est-ce que qui caractérise son écriture, pour vous ?

Je retrouve dans ses récits une manière de raconter qui lui est propre. Il semble ne pas se concentrer sur l’histoire en général, mais elle est comme un fleuve que nous suivons depuis sa source, où l’on ne peut deviner où il nous emmène. Peu à peu, il tisse un réseau de liens entre des personnages très complexes, et cela me plaît beaucoup.

Lequel de ses personnages avez-vous le plus apprécié ?

Dans Loup de Pluie, c’est évidemment le patriarche des Cody, pour l’aspect sombre du personnage, un des plus marquants du récit. J’apprécie également le personnage d’Andy, son fils, pour son caractère à la fois méchant et stupide. Les personnages jouant les rôles de mauvais me sont les plus agréables à dessiner !

La galerie de personnages est savoureuse

Vous alternez des cases avec une ligne très claire pour les personnages, tandis que vous jouez énormément avec les ombres dans d’autres cases, en particulier pour le décor ou pour les scènes d’intérieur. Est-ce une façon de vous accaparer le volume, ou préférez-vous laisser le champ libre pour que votre couleur renforce le trait ?

La définition de mon trait est la simplicité, et c’est pour cela que la couleur me permet de donner de la force lorsque c’est nécessaire. Dans Loup de Pluie, j’ai voulu mélanger mon trait habituel assez propre avec un trait plus "sale", qui convient particulièrement aux ambiances de western. J’ai travaillé cet aspect avec la même matière dans la couleur.

Vous réalisez vous-même votre mise en couleur. C’est une volonté d’accompagner jusqu’au bout le sentiment que vous désiriez glisser dans vos planches ?

Pour moi, la couleur est une part indispensable de la narration, mais elle est surtout indissociable de la composition de la case, voire de la planche. Selon moi, la couleur est aussi importante que le crayon et l’encre. Je dessine avec la couleur dans ma tête, et en même temps, la mise en couleur elle-même joue un rôle indispensable dans la composition de mes cases, tel un élément pour générer émotion. Enfin, la lumière est pour moi le point-clé, aussi bien en noir et blanc qu’en couleur.

Votre découpage est très aéré (rarement plus de cinq cases par planche), nous savons que Jean Dufaux livre un découpage très précis à ses dessinateurs ? Ce style de collaboration vous convient-il bien ? Avez-vous pu parfois vous détacher quelque peu de son cadrage pour en proposer un autre ?

Une chose qui me plaît beaucoup de cette histoire, c’est que Jean me donne liberté totale avec le découpage de la planche. Il connaît mon travail, et il a pensé beaucoup à moi en laissant la possibilité à mon dessin de raconter cette histoire comme je pouvais la ressentir. Il a choisi de travailler avec peu de cases par planches pour que mon dessin profite de l’espace, puisse surtout mettre en place les paysages. Cette liberté me permet de profiter au mieux de son récit.

Quelle documentation avez-vous utilisée pour cet album ?

Je possède pas mal de livres traitant du western, ainsi que des films. Mais ce sont principalement les illustrateurs américains qui m’inspirent. Ainsi, mon western emprunte un chemin plus éloigné d’une documentation authentique de l’époque, car je préfère travailler avec l’univers que j’ai dans la tête, ayant été nourri par un ensemble de réferents, autant au niveau plastique que cinéphilique. Jean m’a également envoyé des livres, mais afin que je m’en serve comme une réference de ce qu’il avait dans son "imaginaire".

De combien d’albums va se composer cette histoire ?

Dans un premier moment, l’idée initiale a été de réaliser deux albums, mais Jean a eu ensuite l’envie d’entrer plus profondément dans l’univers des personnages de Loup de pluie, et nous sommes donc partis pour quatre tomes.

Les récits de Dufaux gardent une part de mystère qui les rend unique...

(par Charles-Louis Detournay)

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A propos de Ruben Pellejero & Jean Dufaux, sur ActuaBD :

- La chronique du premier tome de Loup de pluie

- « Le travail sur la lumière est aussi une manière de raconter l’histoire ». Entretien en avril 2009.

- Jean Dufaux : combien d’albums au conteur ?

- L’impertinence d’un été T1, T2

- Le Tour de valse

 
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