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Sandokan, un récit inédit d’Hugo Pratt

Par Charles-Louis Detournay le 27 juin 2009                      Lien  
Près de quinze ans après sa disparition, Hugo Pratt reste très présent dans le cœur des lecteurs. C'est dire si la prochaine publication d'un récit inédit est considérée comme un évènement d'importance. De plus, Casterman est loin de rester inactif dans l'édition de l'œuvre du maître ...

Au dernier festival d’Angoulême, Casterman annonçait déjà en grande pompe la venue d’un inédit d’un des maîtres de la bande dessinée européenne : Hugo Pratt. Décédé en 1995, le maestro italien est internationalement reconnu pour son personnage emblématique Corto Maltese, mais également pour ses Scorpions du Désert, Sergent Kirk, Fort Wheeling, etc.

Lors de son retour en Europe après son long séjour en Amérique du Sud, Pratt dessina une multitude de récits pour la magazine italien, le Corriere dei Piccoli. Parfois seul aux commandes, mais souvent accompagné au scénario par Mino Milani, il déroutait ses collègues par sa vitesse d’exécution, ce qui provoqua une tension le poussant à la porte de son éditeur, avant de lancer le magazine Sergent Kirk.

C’est dans cet intervalle de temps que Minali adapta un roman de l’écrivain italien Emilio Salgari (1862-1911) : Sandokan. Il s’agit d’un pirate redouté, surnommé le Tigre de Malaisie, et qui sévit dans les alentours de Bornéo en 1849. De son île sauvage, il prépare des raids en tous genres, galvanisé par sa haine des Blancs, qui avaient assassiné sa famille. Le récit commence alors qu’une tempête balaie le repère de Sandokan, et qu’un marin portugais vient lui parler d’une splendide jeune femme aux cheveux d’or, ce qui décide le pirate à partir à sa recherche ...

Dessinées au moment de la Ballade de la mer salée, ces trois premières pages donnent un bel avant-goût de cet album :

Sandokan, un récit inédit d'Hugo Pratt

© CONG SA / Casterman - Pas de reproduction sans accord préalable

Pratt commença à dessiner les deux parties de ce récit, jusqu’à sans doute se brouiller avec son éditeur. Dominique Petitfaux qui s’est entretenu pendant des années avec l’auteur, nous a d’ailleurs confié que cette série "annoncée dans le "Corriere dei Piccoli", avec une case, dans les n°6 et 7 de 1971" n’avait jamais été publiée. Dans son livre d’interview, De l’autre côté de Corto, Petitfaux recueillit d’ailleurs les propos de Pratt sur ce sujet : "[Les] planches [d’I pirati della Malesia [1] ont été volées. Je ne sais pas par qui, mais Francesconi, le directeur du journal [le Corriere dei Piccoli], le sait, et il a promis de me le dire un jour !" [2].

L’album est déjà paru en Italie.

Si Casterman communique d’une manière plus consensuelle : « [Sandokan avait été] oublié dans un carton au fil de l’histoire agitée de la maison d’édition qui en avait commandé la réalisation », on peut se douter qu’un arrangement a finalement été trouvé, pour qu’enfin les lecteurs puissent en profiter.

Alors que l’album est sorti mi-mai en Italie, la maquette de Casterman a subi quelques retards, de quoi déplacer son lancement pour la rentrée, vers la fin du mois d’août. Construit en deux fois 64 planches (à l’italienne) adaptant les deux parties du roman éponyme, l’album reprend 48 planches de la première partie, ainsi que quatre planches de la seconde. Comme le livre est annoncé avec 80 pages, il comprendrait sans doute un historique de ce récit mouvementé, et la base du roman de Salgari.

Dominique Petitfaux nous confia également : "Il est curieux de voir Pratt se couler pour une ultime fois dans une œuvre qui n’est pas vraiment la sienne...", mais après la parution d’épisodes inédits du Sergent Kirk par Futuropolis, et ce Sandokan inconnu, nous profiterons aussi à la rentrée de la publication d’Histoires de Guerre, une brique de 700 pages. Nous y retrouverons douze histoires réalisées dans les années 60 pour la Fleetway, dont la moitié ont été éditées dans Du sable, rien que du Sable et Deux ou trois choses que je sais d’eux. Cette nouvelle mouture reprendra la présentation strictement conforme à ce qu’était l’édition originale, à savoir une, deux ou trois images par page. Mais nous aurons l’occasion d’y revenir.

Pour nous faire patienter jusqu’à cette fin août prometteuse, Casterman prolonge la nouvelle présentation chronologique en couleurs des aventures de Corto Maltese, avec la parution conjointe des Éthiopiques, des Celtiques et de Fable de Venise. En guide de prologue, il n’y a plus d’aquarelles de Pratt, mais un reportage photo actuel, se coulant dans les pas de l’auteur et les lieux décrits dans l’album. Une introduction poétique qui permet de glisser progressivement dans le monde merveilleux et unique de Corto.

On profitera particulièrement de la préface de Fable de Venise : elle contient une aventure inédite et inachevée de Corto dans la Sérénissime. A peine esquissés, ces quelques dessins prennent pourtant toute leur valeur pour recomposer le puzzle qu’était Hugo Pratt, surtout au sein d’un de ses récits les plus personnels et mystérieux.

Dans un contexte plus pédagogique, n’oublions pas non plus la sortie prochaine de la Jeunesse de Corto et justement de Fable de Venise dans la collection Classiques & Contemporains, chez Magnard. Destinés à être étudiés en classe, ces livres contiennent en fin de volume un contexte historique du récit, une analyse de l’œuvre et des grands thèmes évoqués, le tout pour 6,50 €.

Enfin, Pratt sera prochainement mis à l’honneur dans le Port de Bruxelles, où une gigantesque fresque de 80 m de long sera bientôt dévoilée au public. Les autorités compétentes sont en train de régler les derniers détails avec Cong SA, gérant les droits de l’auteur, mais on nous promet une très belle représentation du monde de Corto Maltese, inaugurée pour l’ouverture de Bruxelles-les-Bains, à savoir le 17 juillet prochain. Vu le court délai, ce sera sans doute une immense bâche qui viendra orner le mur dans un premier temps.

Laissons le mot de la fin à Hugo Pratt : "[...] Ce qui me trouble, c’est ce que je n’aurais jamais le temps de faire tout ce que j’ai en tête ..." [3]. De fait, ses éditeurs n’en terminent pas d’exploiter ce qu’il a publié.

(par Charles-Louis Detournay)

Cet article reste la propriété de son auteur et ne peut être reproduit sans son autorisation.

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[1Premier titre de ce récit

[2De l’autre côté de Corto, Entretiens avec Dominique Petitfaux, p 163.

[3De l’autre côté de Corto, Entretiens avec Dominique Petitfaux, p 56

 
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