En 1906, le site minier de Courrières est le théâtre d’un dramatique accident qui coûte la vie à 1099 personnes, dont 242 enfants. En ce début de vingtième siècle, le Nord de la France est entraîné dans la frénésie productiviste de l’exploitation du charbon. Chaque garçon dès 16 ans, en âge de soulever un outil et se glisser dans un wagonnet, est un potentiel mineur. Des centaines d’hommes passent d’interminables journées et d’interminables nuits sous la terre à creuser et à extraire des tonnes de charbon. Le 10 mars 1906, suite à un incendie souterrain, une très violente déflagration sème le chaos et la mort dans les veines de la mine.
S’en suivent de longues heures de doute, d’espoir et finalement de résignation. Peu d’ouvriers en ont réchappé. Les autorités décident de murer les galeries pour restreindre l’incendie. Mais deux semaines plus tard, un petit groupe de survivants (rapidement désignés par un néologisme : les rescapés) fait surface. A-t-on privilégié le sauvetage du charbon à celui des vies humaines ? La question agite la société française et le gouvernement du « Tigre » Georges Clemenceau…
Jean-Luc Loyer, coutumier des bandes dessinées à thématique ouvrière et sociale (On se souvient de Noir Métal chez Delcourt), calque son album sur la chronologie précise des dramatiques événements de Courrières. Ce faisant, il délaisse l’aspect humain pour privilégier la dimension documentaire. On suit pas à pas l’engrenage qui amène à la catastrophe. On est scandalisé lorsque, alerté par un chef porion, la direction de la mine déclare sur un ton solennel que « … la Compagnie ne peut en aucun cas se permettre de ralentir sa production. La France a besoin de son charbon… ». Mais jamais on ne s’attache réellement aux personnages de « Sang noir », aussi tragique soit leur destin, tant l’auteur semble chevillé aux faits historiques qu’il relate avec pédagogie.
Richement documenté, « Sang noir » a les défauts de ses qualités. L’histoire ne s’autorise pas assez d’espace fictionnel pour réellement toucher le lecteur. Dommage.
(par Morgan Di Salvia)
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