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Saria, T2 : La Porte de l’ange - Par Jean Dufaux & Riccardo Federici - Delcourt

Par Charles-Louis Detournay le 2 janvier 2013                      Lien  
Cinq années après le T1 des "Enfers" paru chez Laffont, voici enfin la suite de cette trilogie, renommée "Saria", et qui profite de l'explosion graphique d'un nouveau dessinateur remplaçant Serpieri. Nul doute que Dufaux et Federici aient respectivement trouvé le collaborateur idéal pour nous entraîner dans de nouveaux univers imaginaires éblouissants.

Venise. Le prince Assanti se meurt. Il confie à sa fille naturelle, Saria, un coffret contenant trois clefs qui, utilisées sur la Porte de l’Ange, donnent accès l’une au Paradis, l’autre aux Enfers, et la troisième au Néant.

Escortée par Orlando, un fidèle serviteur, la petite fuit loin du palais royal et de ses dangers. Six ans plus tard, la jeune femme, surnommée la Luna, se prépare à affronter son destin. Mais son oncle, le Doge, fait l’impossible pour reprendre ces clefs maudites, afin d’asseoir son autorité vacillante sur la Sérénissime. Mais, dans l’ombre, l’ange Galadriel, ancien détendeur des clés, élimine tous les importuns pour récupérer son dû.

Saria, T2 : La Porte de l'ange - Par Jean Dufaux & Riccardo Federici - Delcourt

Lorsque Delcourt rachète le catalogue des Éditions Laffont [1], il y trouve des pépites, mais tout ce qui brille n’est pas or.

Ainsi, La Madone de Pellini dessiné par Federici est graphiquement très beau, mais le scénario confus de François Rivière mine le récit. Qu’importe, le diptyque se termine. D’autres séries sont plus compliquées à mener à terme, telle l’angoissante collaboration de Jean Dufaux et de Serpieri ! Car, après quelques pages du tome 2, le dessinateur italien doit malheureusement se résoudre à abandonner définitivement le dessin pour raisons médicales.

C’est pourtant bien dommage, car Dufaux avait créé ce scénario spécifiquement pour le dessinateur de Druuna, qui désirait mêler Venise et un monde entrant dans une déliquescence presque organique comme il avait pu les créer précédemment. C’est alors que Marya Smirnoff, éditrice de Laffont qui avait été reprise par Delcourt en même temps que le fond, lui présente le travail de Riccardo Federici.

Les auteurs se réappropient les grands lieux de Venise.
Ici l’Arsenal, où un certain Corto tentait de déchiffrer les inscriptions sur l’épaule d’un lion, en d’autres temps.
Si la couverture de ce T2 se révèle assez racoleuse, le premier tome bénéficie d’une nouvelle couverture plus révélatrice du travail de Federici.

Comme nous l’expliquait Jean Dufaux lui-même : « Cela m’a complètement bouleversé car, sans modifier le contenu de mon scénario, j’ai dû pivoter à 180° sur mon axe afin d’envisager cette suite. Mais j’ai vraiment été ébloui lorsque j’ai vu les premières planches qu’il m’a remises, réalisées en couleurs directes. »

Effectivement, si le travail de Serpieri méritait incontestablement le respect, on est subjugué par les planches de Federici : il s’en dégage à la fois de la puissance, de la violence et une grande sensibilité ! Faisant fi d’un cadrage classique, il mêle parfois les différentes cases pour livrer un grand tableau composite d’une imposante maestria. Sa collaboration avec Jean Dufaux semble si naturelle et si complémentaire qu’on ne peut s’imaginer qu’il s’agissait d’une reprise dans les traces d’un autre dessinateur. À n’en pas douter, les deux hommes se sont trouvés, et nous promettent certainement d’autres collaborations lorsqu’ils auront terminé la présente trilogie.

Quant à l’intrigue de Jean Dufaux, c’est une fois de plus en avançant dans la série qu’on distingue ses thématiques. Bien entendu, Saria/Les Enfers traite du pouvoir : d’un doge qui ne veut pas le céder, et de celui que ces clés confèrent à leur détenteur. Mais cet univers s’étoffe avec une autre puissance qui contrecarre celle du Doge. De la politique, on arrive à la religion, des soudards qui abusent de leur pouvoir, on apprend à connaître des exclus qui se rebellent. Saria fera donc le bonheur des lecteurs à l’imaginaire fertile et aux amateurs de personnages tranchés, car on se retrouve aux prises avec un monde qui ne peut mourir et/ou renaître que dans l’affrontement de titans.

Une nouvelle démonstration du talent de conteur de Jean Dufaux, servi avec brio par le graphisme novateur et éblouissant de Federici !

Enfin, pour les nostalgiques de Serpieri, notons que Mosquito a publié en septembre dernier l’album Lakota, un recueil de cinq récits dessinés fin des années 1970. Ces différentes histoires inédites en album francophone se concentrent sur les visions des Indiens, mais aussi des soldats à Little Big Horn.

(par Charles-Louis Detournay)

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Lire également
- notre interview de Jean Dufaux, dans laquelle il parle de Saria : « Mes lignes scénaristiques ne sont pas droites, elles sont souvent fracturées. » (Déc 2012)
- notre chronique des Enfers T1
- L’interview de Jean Dufaux concernant Les Enfers T1 : "La première chose, c’est la rencontre avec le dessinateur" (sept 2007)
- l’interview de Serpieri : "Je voulais montrer une Venise futuriste, décadente" (mars 2007)
- notre portrait de Paolo Serpieri : La vérité toute nue

[1On espère avoir prochainement des nouvelles de la dernière série qui n’a pas encore trouvé sa suite chez Delcourt : Moksha.

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