Voilà donc Pythie lancée sur les routes avec sa malédiction, croisant rapidement un jeune héros, Xanthe, fils illégitime de Zeus, qu’Héra a condamné à subir le déclenchement de catastrophes en série. Le Roi des dieux, sous la forme d’un poulet, décide que ces deux-là sont faits pour cheminer ensemble et confie son rejeton aux bons soins de l’oracle débutante. Pour le meilleur et pour le pire.
Cette situation initiale est l’occasion de revisiter, de manière comique, diverses figures de la mythologie grecque. La truie Phaïa, la Chimère, Thésée, Œdipe, Jocaste et le Sphinx : voilà une partie du personnel croisé dans ce premier volume.
La façon dont Elsa Brants se réapproprie ces personnages se révèle détonante, moderne parodie pourtant parfaitement ancrée sur les mythes dont ils sont tirés. C’est drôle tout autant qu’efficace et l’irruption de Pythie, Xanthe et Zeus-poulet dans ces divers récits classiques fait mouche à chaque fois.
La Montpelliéraine Elsa Brants signe chez Kana son premier manga-like. Si elle a auparavant œuvré comme coloriste BD, notamment sur Les Chroniques de Magon dessinées par son époux Guillaume Lapeyre, elle a aussi dessiné Lily, chez Dupuis, série pour tout-petits scénarisée par Nykko.
Se considérant davantage comme une auteur de BD que comme une mangaka, elle se réclame tout autant de Gotlib, Fred, F’murr, Goscinny, Tabary et Cauvin que de Tezuka, Toriyama et surtout Rumiko Takahashi.
On est bien avec Elsa Brants dans cette génération d’auteurs baignée de cultures BD diverses pour qui le syncrétisme de ces influences en apparence éloignées est précisément évident, ne pose strictement aucun problème.
Le fait même de construire son récit sur la mythologie antique en adoptant le format et les codes du manga en constitue une illustration flagrante. On notera toutefois que si le trait évoque effectivement le manga, ou la façon dont il a été digéré par nos jeunes dessinateurs, le découpage des planches relève plutôt de la tradition franco-belge. De même, les effets sonores, typiques du manga, sont assez peu présents.
Il s’agit en tout cas d’un titre à ne pas manquer, ne serait-ce que pour l’humour dont fait preuve son auteure. Les interviews fictives des personnages, en fin de volumes sont à ce titre particulièrement savoureuses.
Kana, qui a fait de la sortie du titre son événement pour cette Japan Expo 2014, réalise un vrai coup du côté de la création manga et on aura un grand plaisir à suivre la suite des aventures de Pythie.
(par Aurélien Pigeat)
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Save me Pythie T1. Par Elsa Brants. Kana. Sortie le 19 juin 2014. 192 pages. 7,45 euros. Sens de lecture occidental.
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