1945. De retour dans un Japon meurtri et vaincu, un soldat sans famille, le bon vivant Kadomatsu, arrive à Tokyo. Il y retrouve son ancien chef, du temps de la guerre en Chine, Toku, qui tient une petite échoppe de soupe. S’il s’en sort mieux que d’autres, Toku est toujours hanté par ce qu’il a fait et vu pendant la guerre.
Entre combines et tragédies, dans une ville occupée par les américains, il est encore davantage question de survie que de reconstruction. Entre les femmes se prostituant et les hommes volant ou chassant les animaux errant, la tableau apparaît terrible, mais en même temps les habitants ont dépassé le stade du désespoir et concentrent tous leurs efforts vers leur survie.
Le second tome quant à lui débute un flash-back du temps de la guerre, partant de la rencontre entre les deux hommes. Toku se voit confier le commandement d’une escouade à la mauvaise réputation, mélange de vétérans désabusés et de nouvelle recrues innocentes, dont fait partie Kadomatsu.
Publié au Japon de 2013 à 2018, en sept tomes, il s’agit de l’œuvre qui a fait connaître Sansuke Yamada, distinguée en 2019 par le Prix Osamu Tezuka et le grand prix de la Japan Cartoonist Association. Le mangaka, touche à tout, acteur et musicien à ses heures, a également signé dans la presse gay masculine.
Ce dernier point peut sans doute expliquer la crudité de certaines scènes, et plus généralement la nudité exposée sans fard, qui contribue au ton brut et juste du récit. Autre point à signaler : la traduction de Sébastien Ludmann, haute en couleurs, pleine d’argot, qui restitue à merveille l’esprit de l’époque.
Un premier contact qui fait mouche, avec des personnages aux traits grossiers, mais sensibles et perdus. Le récit propose également une belle amitié, tout en non-dit, deux solitudes, que tout oppose, mais qui se sont trouvées comme souvent, au milieu d’un champ de ruines et de morts, absurdes et cruels.
(par Guillaume Boutet)
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