L’argument a une double base historique et mythique : au XXe siècle, au Japon, une musicienne nommée Haru parcourt les routes en jouant du shamisen. Elle devient célèbre grâce à ses talents musicaux qui touchent les locaux. Au cours de son voyage, elle rencontre un kappa - esprit des eaux japonais - qui tombe sous le charme de sa musique et lui offre la clé pour accéder à la dimension divine. Forte de cette nouvelle connaissance mystique, Haru poursuit son chemin et croise sur sa route les personnages emblématiques issus du folklore japonais ainsi que ceux tirés des mythes ancestraux nippons.
Le trait léger du dessinateur brésilien Guilherme Petreca s’inspire de l’art ukiyo-e (avec des images du monde flottant) et sort du cadre du gaufrier classique pour emplir parfois la page ou la double-page et emporter le lecteur dans une rêverie méditative. Soulignons aussi la qualité de l’impression "vieux papier" qui donne l’impression de tenir un manuscrit sacré.
Tiago Minamisawa signe avec le concours du dessinateur son premier scénario après s’être fait connaître dans le domaine du court-métrage. Les dialogues sont réduits à l’essentiel pour laisser parler les images. Haru, la musicienne errante, éprouvera le pouvoir du pardon lors d’un parcours initiatique qui lui fera rencontrer des archétypes de la mythologie japonaise (un vieux sage, un yokai, la déesse du bonheur, le dieu de la mort, le dieu de la lune, la sorcière des neiges).
Un dossier de 40 pages permet de combler la curiosité du lecteur qui ne manquera pas de vouloir en savoir plus sur cette curieuse histoire. Ce roman graphique s’éprouve autant qu’il se lit avec la possibilité (en scannant un QR code) d’écouter la musique traditionnelle minyo enregistrée par deux musiciens.
Une belle et profonde méditation sur le pouvoir de la musique comme lien social et source d’une profonde résilience dans un monde éphémère et cruel mais parfois si beau.
(par Stéphane GROBOST)
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Shamisen - par Guilherme Petreca et Tiago Minamisawa - Éd. Ankama