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Sherlock Holmes – Par Leah Moore, John Reppion et Aaron Campbell – Panini Comics

Par AVELINE, Franck le 1er février 2012                      Lien  
Depuis la création, par Sir Arthur Conan Doyle, du personnage de Sherlock Holmes dans les pages du Beeton’s Christmas Annual en 1887, les déclinaisons référentielles au désormais mythique détective privé ne manquent pas. Leah Moore, John Reppion et Aaron Campbell, ajoutent à l’édifice séculaire une pierre bien intéressante.

Quelle que soit la nature de ces déclinaisons référentielles (hommage comme pastiche) et quel qu’en soit le médium (cinéma, théâtre, roman, bande dessinée) la qualité narrative intrinsèque aux œuvres originelles de l’écrivain anglais (désignées comme le « Canon » ) a régulièrement permis à leurs créateurs/adaptateurs respectifs d’atteindre une réelle qualité d’écriture et de réalisation. Par cette qualité sourde, et l’intérêt manifeste qu’elle engendre depuis des générations, l’œuvre holmésienne envoute ; tantôt par l’humour ravageur et ineffable du film Without a Clue de Thom Eberhardt, tantôt par la transposition contemporaine et efficace de la série télévisée anglaise Sherlock produite par la BBC, ou encore les formidables Holmes de Luc Brunschwig et Cécil aux éditions Futuropolis –pour ne citer que ces seuls exemples parmi un florilège vertigineux constitué, entre autres, de plus de 250 films (dont le premier, Sherlock Holmes Baffled, dès 1900).
Le Sherlock Holmes de Leah Moore , John Reppion et Aaron Campbell ne déroge pas à cette tradition et répond avec succès au challenge représenté par la complexité de concevoir et rédiger une intrigue fidèle à l’œuvre originelle, puisqu’habitée par elle.

Londres, 1895. Une explosion de grande ampleur détruit totalement le grand entrepôt à la croisée de Challenger Lane et Doyle’s street. Simultanément, la presse londonienne annonce la visite imminente du baron allemand Albrecht Lothair, et le rédacteur en chef du journal The Comet reçoit un courrier anonyme. Ce dernier menace des pires représailles la nation britannique, si cette dernière accueille le fameux baron, au cœur des dissensions continentales relatives au statut de l’Alsace-Lorraine.
Pour ajouter à la tension latente dans les locaux de Scotland yard, Sir Samuel Henry, ancien commissaire-adjoint retiré tôt de la police pour raisons de santé, tuberculeux et alité, écrit à Holmes. Dans ce courrier, il avertit le célèbre détective qu’il a reçu une lettre anonyme par laquelle il apprend que, malgré son état de mourant, il sera assassiné dans sa chambre le lendemain soir à 19h00 ; son absence au fatidique rendez-vous impliquerait alors la mise à feu de nombreux explosifs disséminés dans Londres. Épaulant Scotland Yard et l’inspecteur Lestrade dans la protection rapprochée de Sir Henry à son domicile, Holmes se voit convié, par le malade lui-même, à le rejoindre dans sa chambre quelques minutes avant l’échéance… avant d’y être retrouvé - suite à une détonation - un pistolet encore fumant en main devant le corps alité et ensanglanté de la victime, par des policiers et un docteur Watson stupéfaits !
Sherlock Holmes – Par Leah Moore, John Reppion et Aaron Campbell – Panini Comics

Fidèles à tous les codes narratifs du récit dit de « La Chambre close » -type particulier de récit policier- les scénaristes Moore et Reppion renouent avec les œuvres qui définirent les contours du genre (comme Le Mystère de la chambre jaune de Gaston Leroux ou encore La Chambre ardente de John Dickson Carr). Elle-même sous-genre littéraire du fameux « whodunit » anglo-saxon, cette écriture particulière se caractérise par les indices qu’elle distille au fil du récit ; charge revient au lecteur de relever ces indices et de quitter la passivité d’une lecture linéaire qui l’amène habituellement jusqu’à la résolution de l’enquête, offerte sur un plateau.
S’il ne répond pas entièrement à cet impératif stylistique, le récit de ce Sherlock Holmes n’en distille pas moins suffisamment d’indices pour que le lecteur attentif franchisse le pas, et s’investisse dans la résolution de l’énigme. Souvent graphiques, ces éléments ajoutent à l’attention nécessaire pour la lecture. Loin d’atteindre des sommets de réalisme ou d’esbroufe technique, le dessin de Campbell évolue néanmoins selon les séquences représentées - offrant ainsi un trait épais et adouci à la lumière des bougies, comme dans les scènes d’intérieurs, à contrario beaucoup plus sec et rêche à la lumière du jour, comme dans les scènes extérieures et d’action. Le dessin, au service du scénario avant tout, confère alors, et au final, une tension graphique complémentaire à celle développée par le récit.

Le temps du récit, pour sa part, prend place suite à la nouvelle La Maison vide consacrant le retour du détective après que tous aient cru en sa mort apparente dans les chutes de Reichenbach (une mort contée par Conan Doyle dans la nouvelle Le Dernier problème).

Ponctué par des dialogues très proches de l’écriture de l’illustre auteur, le scénario ne donne pas à lire l’aventure sous l’angle unique du Docteur Watson comme il est d’usage au cœur des récits du canon holmésien. En effet, les scénaristes se sont appliqués, au moyen d’une prise de recul salutaire, à intégrer le point de vue du docteur Watson à ceux de personnages extérieurs au duo enquêteur ; le désarroi de l’un et l’impuissance de l’autre (émotions interchangeables au fil de la narration) vus de cet « extérieur », offrent ainsi à cette histoire originale une dimension immersive décalée et une dramaturgie qui contenteront, sans hésitation, l’amateur éclairé comme le néophyte curieux de l’univers de Sherlock Holmes.
Sherlock Holmes

(par AVELINE, Franck)

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