Köstler est un chien, comme aiment lui répéter les officiers de l’armée du WeltRaum, l’état totalitaire qui gouverne le pays. Aux yeux de l’idéologie du parti, il fait partie d’une sous-race. Ainsi, dès son enfance, il est arraché aux bras de sa mère, abattue sous ses yeux, et subit pendant des années un reconditionnement à base de messages de propagande.
Son talent sur le champ de bataille lui vaut l’insigne honneur d’être introduit dans la plus prestigieuse division de l’armée : les Skraelings.
Mais une fois au cœur de la mêlée, il découvre l’imposture : cette unité d’élite ne participe jamais à aucune bataille, et se livre à des reconstitutions en massacrant des esclaves habillés en soldats ennemis, sous les caméras de l’unité de propagande.
Progressivement, alors que ses talents de combattant hors pair lui permettent d’échapper plusieurs fois à des complots, Köstler commence à ouvrir les yeux sur sa vraie nature et celle du WeltRaum.
Cette série en trois volumes, se déroulant dans un monde alternatif mais calqué sur le régime nazi, glace le sang et choque en multipliant les images à la limite du soutenable : exécutions sommaires, arrachage de cœur, cervelle qui gicle, massacre d’innocents...
Le scénario de Thierry Lamy nous montre une plongée effroyable dans un monde provoquant la nausée, dont le héros n’est autre qu’une machine à tuer, qui se met progressivement à dérailler à mesure que des flashbacks traumatisants de son enfance lui reviennent en mémoire. Ce second tome permet de s’identifier à peine un peu plus à Köstler, et apporte ainsi, en introduisant de la romance, un peu de lumière après un premier épisode qui tenait surtout de la descente aux enfers.
La pertinence du propos sur la propagande, poussé à un point proche de la dérision, fonctionne à plein régime. Le lecteur a parfois l’impression d’assister à un immense cirque, où une armée de clowns de la mort tenteraient tant bien que mal de bricoler le spectacle parfait en empilant des cadavres.
Le dessin de Damien Venzy, à base de textures glaçantes, de visages cauchemardesques et d’ambiances aussi dessaturées et froides que le métal, déshumanise encore un peu plus cet univers plombant et glauque. Même les scènes d’amour sont traitées mécaniquement, comme si tout espoir de s’accrocher à un quelconque bonheur charnel, nous était enlevé à coup de baïonnettes.
Bien que passionnante, la lecture (surtout pas avant de s’endormir) de ces deux premiers épisodes est un vrai calvaire, une torture. Signe que le pari est réussi.
(par Thomas Berthelon)
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