Romans Graphiques

Solon - par Elisabeth Voyame - Ed. Antipodes

Par Nadine RIU le 29 juin 2021                      Lien  
Elisabeth Voyame entre dans l’univers du 9e art avec un premier album remarquable, "Solon", la biographie d’un homme sans racine, adaptée du "Roman de Solon" de Martine Ruchat, qui redonne vie et paroles à ces enfants, « placés, enfermés, et qui se sont tus ».

C’est dans le Genève du 19e siècle, qu’est né et qu’a vécu Solon, enfant illégitime, abandonné et placé en institution. Sa vie bat au rythme des vols et de la mendicité pour se nourrir, une quête de la survie qui le conduit à de multiples reprises en prison.

La souffrance de Marc Solon est celle d’un homme qui ne possède ni mémoire familiale ni même une identité propre, le nom de Solon ayant été donné par l’administration à sa mère, elle-même abandonnée à l’âge de quatre jours. « Des noms facilement reconnaissables distincts de ceux des honnêtes gens et qui devaient permettre aux assistés de prendre place dans la commune avec un statut bien défini  ».

Solon - par Elisabeth Voyame - Ed. Antipodes

Ce statut, d’être utile à un pays qui l’oblige uniquement à des devoirs et à ne jamais rien posséder, Solon le refuse. Il fuit alors Genève et devient vagabond pour être maître de la seule chose qu’il possède, le temps.

Établi et reconstitué à partir de documents d’archives administratives et judiciaires, l’histoire de Marc Solon induit une réflexion sur la transmission des mémoires. La force du roman graphique d’Elisabeth Voyame émane de la volonté de doter cet homme invisible aux yeux de la société, d’une humanité qui ne transparaît pas dans les documents d’archives et d’une personnalité affirmée et attachante.

L’évocation de la société genevoise calviniste est un autre point fort de l’album. L’autrice la décrit sans cliché mais égratigne au passage une bourgeoisie qui s’assigne une mission philanthropique auprès de ces "damnés de la terre". Ils survivent dans une Genève qui apparaît carcérale pour Solon et sa mère, prédestinés et condamnés à être enfermés dans un déterminisme social sans échappatoire.

Le lavis de l’encre de chine ajoute une touche surannée à l’atmosphère mélancolique de cette histoire saisissante qui ancre parfaitement la ville de Genève dans la temporalité de l’histoire.

Historienne de l’art et enseignante de formation, Elisabeth Voyame se révèle talentueuse avec Solon, sa première publication en tant que dessinatrice. Souhaitons-lui de concrétiser d’aussi beaux projets que ce premier opus.

(par Nadine RIU)

Cet article reste la propriété de son auteur et ne peut être reproduit sans son autorisation.

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Code EAN : 9782889011735

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