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Soucoupes - Par A. Le Gouëfflec et Obion - Glénat

Par Tristan MARTINE le 14 juillet 2015                      Lien  
Une histoire d’art et d’extraterrestre dans la France uchronique des années 1950. Un chef d’œuvre de poésie.

Dans une France des années 1950 dans laquelle les extraterrestres sont en contact étroit avec les êtres humains, l’un de ces extraterrestres se prend d’affection pour Christian. Le robot venu de l’espace décide de s’intéresser d’abord à la musique que vend ce disquaire, puis à ses goûts picturaux, érotiques ou philosophiques. En retour, il lui permet de se projeter à l’intérieur des œuvres d’art.
Soucoupes - Par A. Le Gouëfflec et Obion - Glénat
Cette œuvre est la second du duo Arnaud Le Gouëfflec / Obion, après Vilebrequin (œuvre qui s’était trouvée bien malgré elle au cœur d’un triste imbroglio juridique). Le Gouëfflec, écrivain touche-à-tout, s’était déjà fait remarquer en 2013 avec J’aurai ta peau Dominique A, tandis qu’Obion, brestois lui aussi, a commencé sa carrière sur des scénarios de Kris (Le déserteur, KR-OB art), avant de livrer des œuvres assez diverses, de Donjon crépuscule à l’Atelier mastodonte en passant par son Love blog) à quatre mains avec sa compagne de l’époque, Gally.

Le dessin d’Obion est magnifique, à la fois épuré et précis, élégant et efficace (comme par exemple la réussite de l’opposition entre la rondeur et la pâleur du volubile Christian et la verticalité, l’aspect sombre et raide du robot ET dont ne sort aucun son). Le dessinateur breton insère dans son dessin irréaliste différents éléments quasi-photographiques et multiplie les trouvailles ingénieuses, notamment en ce qui concerne les onomatopées.

Un exemple du travail judicieux et original sur l’onomatopée

Mais c’est également, et surtout, son travail sur la couleur qu’il faut noter. Cet album est un modèle d’une utilisation intelligente des possibilités offertes par la mise en couleur. La couverture de l’album, absolument splendide, le genre de dessin dont on aimerait posséder une belle reproduction à afficher fièrement dans son salon, donne d’emblée le ton : les couleurs enveloppent le dessin, le magnifient. Ce travail, en tout point exemplaire, devrait être mis entre les mains de bien des coloristes qui devraient y trouver matière à inspiration.

Ce dessin est au diapason du scénario et des dialogues. Le récit est extrêmement touchant, plein d’humour, de délicatesse et, aussi paradoxal que cela puisse paraître pour parler d’un extra-terrestre, d’humanité. Pour qualifier cet album, un seul adjectif semble convenir : poétique. L’art, en général, est au cœur de cette œuvre, qu’il s’agisse de musique ou de peinture. On parle souvent de feel good movie, on a ici clairement à un feel good comics, qui arrive à transmettre des émotions artistiques comme peu de bandes dessinées ont su le faire (on pense par exemple au quatrième volume des aventures de Monsieur Jean, de Dupuy et Berbérian, dans laquelle une toile est vraiment au cœur de l’intrigue) et des émotions humaines avec une telle pudeur.

L’art est au centre de cette œuvre poétique. Le disquaire jouit ici de la possibilité offerte par l’ET de se plonger dans son tableau préféré.

Le Lyon BD Festival lui a donné le Prix spécial du jury, et ce choix semble tellement justifié que l’on voit mal comment le prochain Angoulême pourrait passer à côté de qui est, pour l’instant, l’une des plus belles surprises de 2015.

Obion reçoit, un verre de whisky québécois à la main, le prix spécial du jury des mains de Sarah Gontard, l’une des talentueuses organisatrices du festival.

(par Tristan MARTINE)

Cet article reste la propriété de son auteur et ne peut être reproduit sans son autorisation.

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