Stanley Martin Lieber est né à Manhattan le 28 décembre 1922 dans une famille d’immigrants juifs d’origine roumaine. Son père Jack Lieber est tailleur. Son oncle, Robbie Solomon, l’introduit en 1939 dans un nouveau label dédié aux comics dirigé par Martin Goodman : Timely qui s’appellera plus tard Atlas puis Marvel.
Il a 17 ans quand il fait ses débuts de scénariste dans le numéro 3 de Captain America (mai 1941), une création de Joe Simon et Jack Kirby, et choisit le pseudonyme de Stan Lee. Quand les deux créateurs de Captain America se fâchèrent avec Goodman fin 1941, Stan Lee fut nommé rédacteur en chef par intérim, à 19 ans. On le délogera d’autant moins de ce poste que sa sœur Jean épousa le patron quelques années plus tard... La boîte publie des comics sentimentaux, des westerns, de la SF, des aventures médiévales, des histoires d’horreur, de suspense, d’humour… Il en devint rapidement le directeur artistique de la maison jusqu’à qu’il succède à Martin Goodman à la direction de la société en 1972.
Mais après son service militaire à la fin des années 1940, les choses ne sont pas si simples. Sa société est en difficulté en raison d’une concurrence féroce et du succès de l’éditeur dominant de l’époque DC Comics qui triomphe avec Superman et Batman. Lee envisage même de changer de métier…
L’ascension de Marvel
Le concurrent DC Comics, justement, vient de trouver une formule pour renouveler le genre des super-héros à bout de souffle en raison d’une inflation de personnages en collants dotés de super-pouvoirs : la Justice League of America, une alliance de tous les super-héros de la maison. Stan Lee saute sur l’idée : il multiplie dans son catalogue les groupes chorales en insufflant dans ses récits des thèmes aux accents personnels et sociaux et des personnages à la personnalité troublée qui s’adressent directement aux lycéens, les principaux lecteurs de ces aventures. Pour ce faire, il peut s’appuyer sur trois dessinateurs de génie : Jack Kirby, « the king of comics », Steve Ditko et (brièvement) Bill Everett.
S’en suit une sarabande de titres à succès : Fantastic Four (1961), Hulk (1962), Thor (1962), Iron Man (1963), les X-Men (1963) et les Avengers (1963) avec jack Kirby, Daredevil (1964) avec Bill Everett, Spider-Man (1962) et Doctor Strange (1963) avec Steve Ditko, une mythologie d’autant plus efficace que leurs univers s’entre-pénètrent dans une saga discontinue qui fait revenir des personnages créés dans les années 1940 comme Sub-Mariner ou encore le Captain America, qui créée des entités multi-univers comme Galactus et qui surtout n’évite aucune allusion aux soubresauts politiques et sociaux qui concerne la jeunesse de son époque comme le Mouvement des droits civiques, la Guerre du Vietnam ou le Flower Power. Il est par exemple l’un des premiers à introduire des Afro-Américains, des noirs quoi, dans ses scénarios.
Cette nouvelle façon de faire s’accompagne d’une mise en avant des co-créateurs : Kirby, Ditko, Everett mais aussi John Romita Sr, John Buscema, Gene Colan, John Byrne etc. mais soigneusement compensée par une appropriation de leur travail habilement mise en place par le système de fonctionnement de Stan Lee : il trouve l’idée de la situation et du personnage, bien souvent en discutant avec le dessinateur, réalise un vague script développé en séquences par son co-auteur, sur lequel il peaufine les dialogues. Ainsi s’attribue-t-il ces créations sans oublier d’introduire ces récits par le célèbre « Stan Lee Presents… »
Le procédé n’est pas choquante aux USA où les personnages sont la propriété des éditeurs. Elle permit à Stan Lee d’être sur tous les fronts s’activant aussi bien dans la partie rédactionnelle de ses publications que dans le dialogue avec les autorités pour réduire l’impact du Comic Code Authority.
Fin de partie
Sa productivité fut intense jusqu’au milieu des années 1970, moment où il quitta New York pour la Californie pour se concentrer sur sa dernière grande ambition : Hollywood. Mais dans cette partie de cette fin de carrière, il fut souvent confronté aux aléas d’un métier en pleine révolution à cause de l’Internet et du numérique nécessitant une intensité capitalistique hors de sa portée. Par conséquent, il accumula les travaux divers, jusqu’à réaliser quelques scénarios pour DC Comics, sans grand succès.
Ses créations de la Marvel continuèrent néanmoins de prospérer indépendamment de lui au moment où les super-héros, devenus propriétés de majors du cinéma (Warner, Disney…), tinrent la dragée haute à Hollywood. Caution envers les fans autant qu’hommages d’une génération de réalisateurs, Stan Lee multiplia, à l’exemple d’Alfred Hitchkock, les « caméos » dans les films exploitant ses personnages.
Des moments particulièrement attendus par les aficionados qui viennent couronner une carrière qui aura laissé une marque indélébile dans la culture populaire de son temps.
(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))
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