En mission pour le CENTRE, un organisme interplanétaire de recherche médicale, un trio de voyageurs arrive sur une planète censément déserte. Ils rencontrent par hasard un groupe curieux, au fonctionnement proche d’une secte, et découvrent une autre menace : une épidémie qui provoque une mort certaine. Pour Frona, Atta et Senso, la lutte s’engage à la fois pour leur survie et pour vaincre ce nouveau virus.
Des personnages complémentaires, un nouveau monde mystérieux, des paysages luxuriants ou désertiques : on pourrait croire que Stigma répond au cahier des charges d’un récit de SF classique. Mais pour son premier album, Quentin Rigaud s’intéresse avant tout aux relations entre ses protagonistes et à leur évolution. L’ambition tient aux décors, changeants, foisonnants, héritiers d’un Moebius parfois, et influencés par l’esthétique manga. Le trait de Rigaud affirme une belle personnalité, s’affranchissant de styles académiques. Son univers est riche et sa variété de couleurs impressionnante. Et parmi ses idées scénaristiques, ce sable solidifié qu’on peut modeler en traçant des signes (exandre) constitue une bien jolie trouvaille.
Stigma a demandé beaucoup de travail à son auteur, qui a d’abord publié ses planches sur Twitch avant d’essuyer plusieurs refus d’éditeurs. Plus de quatre années séparent les premières pages de cette parution. Si on peut saluer la personnalité de Quentin Rigaud, la longueur de ce récit, très dialogué, fait parfois perdre le fil. Le mélange des genres, dans les échanges entre les personnages, s’avère un peu indigeste. On navigue entre langage policé et post-ado, familiarité et préciosité. Quant aux personnages principaux, leurs différences (une handicapée humaine, un robot, un extraterrestre) n’apportent pas une véritable originalité dans leur comportement.
Réserves de boomer, s’écrieront les millenials ! Mais tout l’enjeu est bien là : trouver un public large et intergénérationnel pour ce gros pavé finalement très ambitieux. Un pari incertain.
(par David TAUGIS)
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