Ken ne sait pas quoi faire de sa vie ni de son grand corps, mais il aime Yumi. Le jour où il lui déclare sa flamme, elle lui annonce qu’elle est d’origine coréenne et qu’elle part à Séoul pour devenir agent de police. Le voici avec un but dans la vie : il va la rejoindre et intégrer, lui aussi, les forces de l’ordre. Mais ce n’est pas aussi simple et, une fois sur place, il sombre dans l’alcoolisme.
Un soir, il prend la défense d’un vieux restaurateur qui vient de lui offrir un bol de nouilles. Doué pour les arts martiaux, il bat facilement ses adversaires. Un chef de gang, Hyoung Nim, qui a assisté au combat, lui propose alors de rejoindre son groupe.
C’est le début d’une amitié virile où les coups pleuvent largement. Ken va découvrir la vie d’un gang, mais aussi les bas-fonds de Séoul. L’auteur, Boichi, lui-même Coréen vivant à Tôkyô, connait bien la ville.
Outre une série sur la mafia asiatique, Sun-Ken Rock développe d’autres aspects très intéressants : la violence, nécessaire dans ce milieu, ne peut pas tout résoudre et les actes ont toujours des conséquences. Ken, qui agit sans réfléchir, va l’apprendre à ses dépens, de même que ceux qu’il a pourtant promis de protéger.
Le rôle de la femme est intéressant aussi : présentées comme des femmes-objets dans une société asiatique très patriarcale et machiste, les femmes de la série cherchent à s’en sortir, comme elles le peuvent, et renvoient souvent l’homme à une image purement physique. Il ne faut toutefois pas idéaliser ce discours car nous sommes bien dans un univers où la femme, avant tout, est là pour assouvir les désirs des hommes, de gré ou de force. Ce qui donne lieu à quelques scènes très violentes, jamais montrées directement (il ne s’agit pas d’un hentaï...) mais suggérées, ce qui est parfois bien plus fort. À déconseiller donc en-dessous de 14 ans...
D’autres thèmes sont abordés de manière plus marginale : le racisme (les Coréens n’apprécient pas spécialement ni les Vietnamiens, ni les Japonais, qui le leur rendent bien), les exactions commises pendant la guerre du Vietnam par les soldats coréens, etc.
Mais il s’agit avant tout d’un manga d’action. Et, dans ce registre, nous sommes servis ! Le dessin alterne entre de superbes scènes très fouillées, détaillées, et d’autres caricaturales. C’est dans les scènes de combat que l’art de Boichi se révèle le plus abouti. En particulier, la rapidité des gestes est très bien rendue, de même que la violence des impacts. Les proportions sont volontairement déformées pour donner plus de force au mouvement. On a mal aux côtes et à la mâchoire après chaque coup. Certaines pages sont tout simplement magnifiques.
L’édition Deluxe regroupe les deux premiers tomes de la série. Pour le moment, l’histoire se met en place, les protagonistes se rencontrent et se jaugent. Ken dénote un peu dans cet environnement, avec ses idéaux de défense de la veuve et de l’orphelin et son amour pour une femme policier. On espère qu’il mûrisse un peu en évitant de tomber dans une soupe gluante de mièvrerie.
Cette édition, outre une très belle reliure rigide avec un vernis sélectif, offre également un petit carnet graphique. Une belle manière, donc, de (re-)découvrir cette série qui vous réservera bien des surprises et des impacts visuels bien réels !
(par Jérôme BLACHON)
Cet article reste la propriété de son auteur et ne peut être reproduit sans son autorisation.
.
Commander Sun-Ken Rock – L’intégrale 1, édition Deluxe -Ed. Doki-Doki.