Le journaliste Frédéric Potet l’annonce aujourd’hui même sur le site Internet du quotidien Le Monde : Casterman et Moulinsard SA ont prévu la sortie d’une nouvel album de Tintin le 11 janvier 2017 !
Un nouvel album, vraiment ? Hergé n’a-t-il pas exigé que ses personnages ne connaissent plus de nouvelles aventures après lui ? Les éditeurs de Tintin ont une imagination (presque) aussi débordante que Georges Remi... Ne pouvant confier Tintin, Milou, Haddock et leurs acolytes à un nouvel auteur, ils s’échinent à faire vivre l’oeuvre du maître. L’exposition de cet automne au Grand Palais ne suffisant apparemment pas, ils ont donc planifié la sortie du premier album des aventures de Tintin depuis le siècle dernier. Des "nouvelles aventures de Tintin" ? Pas tout à fait... Un Tintin au pays des Soviets en couleurs !
Publié à l’origine dans Le Petit Vingtième en 1929 et 1930, fustigeant à juste titre mais pas toujours finement l’URSS de Staline, cet album a pourtant longtemps connu un statut à part. Il a en effet fallu attendre 1973 pour que cette aventure soit rééditée, puis le début des années 1980 pour avoir accès à une édition en fac-similé, et encore plus pour une édition classique en album, mais noir et blanc ! Il s’agit de la seule histoire qui n’a jamais été remaniée ni même colorisée par Hergé et son studio.
Ce que font pourtant Nick Rodwell pour Moulinsart, au nom de Fanny, la seconde épouse d’Hergé, Benoît Mouchart, le directeur éditorial de Casterman et Michel Bareau, directeur artistique des Studios Hergé, qui est l’initiateur du projet et l’artisan de cette colorisation. Travaillant sur les planches originales restaurées, celui-ci aurait effectué une mise en couleurs « respectueuse de l’œuvre d’origine » - aux dires des éditeurs - bien que risquée - Hergé n’ayant laissé aucune indication en ce domaine.
Peu nombreux seront ceux qui refuseront d’admettre que nous assistons là à un énième coup commercial. Bien plus nombreux seront ceux qui se poseront la question de la légitimité artistique d’une telle entreprise. Voici ce qu’en dit Benoît Mouchart, cité par Frédéric Potet :
L’histoire en noir et blanc est très peu contrastée, avec un trait uniforme : pour un lecteur habitué à la “ligne claire” d’Hergé et à son art de la profondeur de champ, les images peuvent apparaître plates. La mise en couleur donne de l’homogénéité à l’ensemble, et accroît en même temps le plaisir enfantin de lire un récit basé sur une course-poursuite.
De quoi lancer le débat... Car si la couleur - à condition d’être subtilement dosée - peut apporter vie et poésie à une œuvre, elle peut aussi dénaturer un trait. Or Tintin au pays des Soviets vaut davantage pour ce qu’il nous donne à observer - la genèse graphique d’un mythe du XXe siècle - que pour ce qu’il nous donne à lire - une longue course-poursuite prétexte à un anticommunisme, certes justifié après coup, mais assez caricatural.
Voir en ligne : L’article de Frédéric Potet
(par Frédéric HOJLO)
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