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Une enquête de Mediapart met en cause l’auteur de BD Florent Ruppert

Par Didier Pasamonik (L’Agence BD) le 5 mai 2023                      Lien  
[MISE A JOUR DU 9.05.2023] La formulation de cet article a suscité bon nombre de réactions, ce que nous regrettons. Comme cet article a déjà été largement partagé et commenté, nous préférons ne pas le modifier, mais la rédaction publiera prochainement un communiqué à ce sujet.

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Le dessinateur Florent Ruppert, connu pour son duo avec Jérôme Mulot, primé à Angoulême, mais aussi pour La Grande Odalisque (série conçue avec Jérôme Mulot et Bastien Vivès, prochainement à l’écran sur Netflix) a essuyé en 2022 deux plaintes pour agression sexuelle qui ont fait l’objet d’une enquête préliminaire classée sans suite. Mais depuis, Médiapart a obtenu le témoignage d’autres femmes le mettant en cause, tandis que Jérôme Mulot, son partenaire de travail depuis plus de 15 ans, a décidé de mettre un terme à leur collaboration.

C’est violent. Voici un auteur que nous croisons depuis des années, dont on a apprécié l’intelligence et l’inventivité, sur le banc des accusés. Était-ce lui d’ailleurs, en sous-texte, la véritable cible de ce qu’il convient d’appeler aujourd’hui « l’affaire Vivès » ? Il est clair que son nom courait depuis plusieurs mois dans les rédactions. Mais sans faits tangibles, la plupart d’entre elles, et en particulier ActuaBD qui n’a pas les moyens de faire ce genre d’investigation, restaient sur leur quant-à-soi, attendant les décisions de justice.

Mais d’autres médias, c’est le cas de Médiapart ici, font « sortir » l’affaire, s’attendant sans doute à ce que l’accumulation des témoignages puisse faire en sorte que l’affaire soit réinstruite. De quoi s’agit-il ? Du comportement d’un dessinateur fêtard et sorteur aux conquêtes multiples et aux pratiques apparemment libertines. Certains témoignages évoquent le déni de consentement à l’égard de certaines de ses partenaires, voire de viol. Ce n’est certes pas à nous de juger, c’est à la justice de le faire.

Que ces faits soient dénoncés, que cela ait un impact sur le comportement des hommes dans le milieu de la bande dessinée, c’est certain, et c’est même souhaitable. Mais cette affaire relevant de la sphère privée, si elle doit être condamnée en cas de qualification criminelle, ne doit pas nous empêcher d’être vigilant : l’article est assorti d’une interview d’un historien, Frédéric Chauvaud, à qui Médiapart pose la question de savoir si la lecture de la bande dessinée est responsable de cette situation. Évidemment que non, répond l’historien qui, si on le lit bien entre les lignes, défend le droit de création d’un Bastien Vivès par exemple.

La dérive, c’est cette accusation de « pousse au crime » dont la bande dessinée est l’objet (ailleurs : les jeux vidéo, les dessins animés, les mangas…), un argument que l’on pouvait lire avant la Seconde Guerre mondiale aussi bien sous la plume de l’Abbé Bethléem que sous celle de Georges Sadoul, figure intellectuelle du PCF, est une nouvelle fois mise en avant.

Rappelons simplement que cette alliance avait abouti à la fameuse loi de censure pour la Protection de la jeunesse de 1949, conçue sous Vichy, promulguée sous la IVe République dans une alliance entre les catholiques et les communistes qui avait permis, par exemple, d’interdire la publication de la revue féministe Ah ! Nana ! Notons au passage qu’elle n’est toujours pas abrogée...

Voir en ligne : L’article de Mediapart

(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))

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Code EAN :

En médaillon : Dessin de Ruppert et Mulot. DR

✏️ Florent Ruppert France L’affaire Vivès
 
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11 Messages :
  • Merci pour l’article,Mais expliquez-moi le rapport entre un auteur accusé de comportements inacceptables qui relèvent de la justice et une loi de censure possible sur des oeuvres qui auraient une mauvaise influence sur la jeunesse - D’ailleurs en matière de "perversions"notre belle jeunesse trouve tout ce qu’il faut sur les smartphones...

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  • A un moment donné c’est aussi aux Français de se révolter contre la faiblesse des moyens de la justice.
    De deux choses l’une, y a t il eu plainte ? Classée, enterrée,
    En cours d’instruction ?

    J’ai lu la grande odalisque je ne connais pas ce monsieur, mais si affaire il y a alors c’est à la justice de trancher.

    Oui c’est peut être facile à dire mais à un moment donné la justice médiatique est un recours malsain.

    Que cette personne passe en justice pour des faits... Sinon abstenez vous.

    La bd est un petit milieu avec de franches rivalités donc attention....

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    • Répondu par vilain matou le 5 mai 2023 à  13:37 :

      Toujours cet argument des rivalités…on va même pas débattre de l’aspect tribunal, ce sera stérile. Mais au moins épargnez nous ce marronnier sur les vilaines femmes carriéristes qui accusent de viol pour éliminer la concurrence. Ce qui est déjà une idée de merde, mais alors en plus dans un milieu comme la bd, ça n’a aucun sens.

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  • Une enquête de Mediapart met en cause l’auteur de BD Florent Ruppert
    5 mai 2023 12:49, par Loi n° 49-956 du 16 juillet 1949

    Pour la loi de 1949, je ne vois pas ce qui lui est reproché, je viens de la lire et ça vise à interdire globalement la vente de hentaï et de contenus pro néo nazis par exemple, aux mineurs. Je ne vois pas.en quoi le parallèle sert, il est au minimum désuet avec la loi qui a été mise à jour en 2021 d’après légifrance.
    Sauf si le but de supprimer cette loi est de vendre aux enfants des hentai comme ça se fait au Japon avec des pubs du même style sur le youtube japonais ?

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    • Répondu le 5 mai 2023 à  14:24 :

      « Était-ce lui d’ailleurs, en sous-texte, la véritable cible de ce qu’il convient d’appeler aujourd’hui « l’affaire Vivès » ? ». Je ne comprends pas bien ce que vous sous-entendez par là. Vivés a été mis en cause pour le contenu de certaines de ses Bd, et pour des insultes sur les réseaux. Ruppert est soupçonné d’agressions sexuelles. Les deux affaires sont sans rapport aucun. Et dans les deux cas, c’est à la justice de faire son travail. Mediapart, comme Libération désormais, aime sortir des « affaires »sur la base de dénonciations. Mais ces dossiers doivent faire l’objet d’enquêtes et de décisions de justice. Il y a des gens qui se comportent mal dans tous les milieux, la BD n’a aucune raison d’y échapper, ni de favoriser ces comportements.

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    • Répondu par Henri Khanan le 5 mai 2023 à  19:06 :

      Oui, il me semble que ce travers d’agresseur sexuel concerne en fait de nombreuses célébrités, cinéastes, romanciers, présentateurs TV, romanciers, PDG, sportifs célèbres. A chaque fois, des hommes au prestige certain, qui en abusent auprès de leurs fans féminines. Rien de spécifique à la BD, donc !

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    • Répondu par coq le 6 mai 2023 à  03:22 :

      Mdr c’est quoi ce ramassie de bêtises ? Les doujinshi hentai etc sont bien interdits aux moins de 18 ans au Japon ! Avec un enorme logo 18+ !

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  • " Certains témoignages évoquent le déni de consentement à l’égard de certaines de ses partenaires, voire de viol. Ce n’est certes pas à nous de juger, c’est à la justice de le faire."

    Ok, la justice jugera mais en attendant :

    1/ Vous avez le droit de croire les victimes.

    2/ 8% des viols font l’objet d’une plainte et 1 à 2 % d’une condamnation judiciaire (Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales).

    3/ un prédateur sexuel qui agit impunément dans la durée et qui beneficie d’une certaine omerta du milieu, et de la tétanies de ses victimes, et des lacunes du système judiciaire, ça n’est pas qu’une "affaire relevant de la sphère privée".

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    • Répondu le 6 mai 2023 à  12:05 :

      Tout ce que vous dites est exact mais ça ne retire rien au fait que c’est à la justice de se prononcer. La justice est imparfaite et souvent défaillante mais nous n’avons qu’elle. Ces dénonciations dans la presse (notamment dans Mediapart, connu pour ses indignations sélectives) sont contre-productives en ce sens qu’elles déclenchent immanquablement un courant de sympathie pour le prédateur présumé. C’est la limite de MeeToo. Plus que jamais, il faut porter plainte quand on est victime et inciter les victimes à le faire. C’est aider les victimes et c’est aider la justice à s’améliorer. Le budget de la justice est en forte hausse, il faut s’en servir !

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      • Répondu le 6 mai 2023 à  13:53 :

        Oui mais il faut plus de financement pour les associations de soutien aux victimes aussi, pour aider et entourer les femmes lors du dépôt de plainte et au-delà. Porter plainte n’est pas chose facile. Il y a beaucoup de progrès à faire encore si on compare la situation de la France à celle de l’Espagne par exemple.

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        • Répondu le 6 mai 2023 à  16:52 :

          C’est une affaire relevant de la "sphère privée" dans la mesure où justement la très grande majorité des viols et des agressions sexuelles ont lieu dans l’entourage de la victime. Vous avez beaucoup plus de chance de vous faire violer par quelqu’un que vous connaissez déjà que par un inconnu pendant votre jogging. Sinon, on peut quand même s’interroger sur l’intérêt de Mediapart de sortir cette affaire (en dehors du fait que Mediapart est lié à plusieurs acteurs du milieu de la BD et fait notamment des coéditions). Mr Ruppert est un inconnu complet en dehors d’une petite sous-partie du milieu de la BD. On peut comprendre l’intérêt d’un tel papier quand ça vise PPDA, Nicolas Hulot ou Depardieu qui avaient des millions d’admirateurs, mais Ruppert, personne ne sait qui c’est. C’est peut-être un type qui se comporte mal, mais ça ne fera de la peine qu’à ses amis de le savoir. Jean-Michel Arroyo n’a pas eu ce genre de publicité, et pourtant, lui est condamné en première instance (son avocate a fait appel).

          .

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