Beaucoup sont Bretons, comme François Morliguen, attiré par la promesse de l’indépendance de sa région faite par Hitler en cas de victoire du Reich.
Ce one-shot revient sur la prise de Berlin par les Russes, les derniers jours d’Hitler, les règlements de comptes et exécutions de la dernière heure...
Dès les premières pages, le style graphique interpelle. Un ultra-réalisme quasi photographique, des cadrages et un traitement des flous très cinématographiques : on est rapidement plongé dans l’enfer des dernières heures de la capitale allemande. L’eau, la boue et le sang nous colleraient presque aux doigts.
Le parti-pris est tellement fort qu’il est difficile de porter un jugement objectif. On aime ou on n’aime pas. Mais le travail de Fabrice Le Henanff est absolument remarquable. Il fait ici un choix artistique fort, et va au bout de ce choix avec un souci du détail et de réalisme qui ne peut que forcer l’admiration.
Malheureusement, c’est précisément par ce biais que le bât blesse. Car sous la pluie, couvert de boue et de sang, il devient parfois très difficile de faire la différence entre un soldat allemand, russe, français... Au final, le détail est toujours là, que ce soit sur un col ou une épaulette et on finit par s’y retrouver, mais à la première lecture, on est vite perdu parmi les différents protagonistes. Il devient alors très compliqué se s’attacher à n’importe lequel d’entre eux, et la narration en souffre terriblement.
On sent le lecteur livré à lui-même au milieu d’une foule d’événements dont l’auteur maîtrise pourtant le moindre détail, au point qu’il semble avoir oublié que nous n’avons sans doute pas les mêmes connaissances sur le sujet et qu’il faudrait qu’il nous accompagne d’avantage. On a le sentiment que Fabrice Le Henanff traite ici un épisode de l’histoire de la Bretagne et un pan méconnu de l’Histoire de France, certes passionnant, mais dont il ne nous donne qu’une partie seulement des informations qui nous permettraient de la comprendre.
Il en ressort un sentiment mitigé : d’un côté, nous avons une petite pépite graphique que l’on prend plaisir à feuilleter, comme un carnet de croquis, après la lecture, de l’autre, nous avons une histoire, certes réaliste, mais confuse et difficilement compréhensible. C’est dommage, car le talent de l’auteur est indéniable.
(par Gallien Chanalet-Quercy)
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