Mandaté pour immortaliser l’action civilisatrice du Lieutenant Farshing aux confins de l’Ouest américain, le photographe Edwards Norman a été est recueilli par une tribu de Sioux du Dakota.
À son arrivée dans la petite ville de Orcupine, le jeune homme a été témoin de faits curieux, une série de meurtres créant un bien curieux climat de haine et de suspicion.
Les cadavres de prostituées sauvagement massacrées retrouvées aux quatre coins de la ville fournissent de bons prétextes au lieutenant chargé de rétablir l’ordre et le droit pour user de méthodes brutales et violentes et désigner un bouc émissaire : les tribus voisines, annonçant par là le massacre à venir de Wounded Knee, point d’orgue des Guerres indiennes.
Au cours de transes et de cérémonies chamaniques, Edwards croit reconnaître dans le monstre qui hante ses cauchemars depuis son arrivée, rien moins que... Jack l’éventreur : En Angleterre, Edward a lui-même photographié les scènes de crime du célèbre tueur en série.
Le jeune photographe servirait-il de lien entre le célèbre assassin et le responsable des meurtres commis dans la petite ville de l’Ouest ? E
Ce récit halluciné mêlant histoire, polar et fantastique continue de bousculer bien des codes narratifs. Amorcée dans le premier tome, la tendance s’accélère pour aboutir à un épilogue aux multiples facettes ne donnant pas toutes les clefs, loin s’en faut ! Les auteurs laissent le soin au lecteur de faire une partie du chemin seul avec… ses impressions et ses propres phobies.
Comme à son habitude, Damien Marie bouscule le lecteur non seulement par des aller et retour entre le Londres Victorien et les plaines de l’Ouest américain, mais aussi par des confrontations entre les « images » de fantasme ou d’hallucination, l’abondance de scènes « cauchemardesques » renforçant une impression générale de malaise. Ce « faux-western » finit par déboucher sur un vrai conte fantasque et halluciné avec une conclusion sombre et tragique bien loin de tout élucider.
L’opposition brutale de différentes visions de la sauvagerie vient en résonance avec cette fin de siècle : importance du spiritisme et de l’occultisme, urbanisation et normalisation de la société auxquelles se heurtent dans la même violence le peuple indien et la démesure d’un Jack l’éventreur.
Évocation cauchemardesque d’un siècle finissant qui en annonce une autre pas moins cruel, cet album s’ajoute aux représentations sombres et pessimistes qui illustrent une grande partie du travail de ce scénariste.
Le recours au fantastique par les visions hallucinatoires du héros fournit à Malnati l’occasion d’élargir sa palette au-delà d’un trait parfois un peu trop réaliste au risque de paraitre parfois un peu figé. Précis et soigné, le graphisme de ce jeune auteur s’accorde sans difficulté à l’esprit du livre.
(par Patrice Gentilhomme)
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Wounded T2 © Bamboo Édition 2011 - Damien Marie, Loïc Malnati