X-Men : Inferno – Par Jonathan Hickman, Valerio Schiti, Stefano Caselli & R.B. Silva – Panini Comics

Voici maintenant trois ans que le scénariste Jonathan Hickman a pris les rênes du destin des mutants. Avec l’événement Inferno, il s’apprête à se retirer de sa fonction de superviseur général des séries X-Men ; laissant place aux équipes créatives qui l’ont accompagné ces dernières années pour continuer à faire vivre les aventures de la famille mutante.

Avec Hickman, les mutants ont retrouvé dans le monde une place hégémonique proche de ce qu’avait pu raconter Grant Morrison au début des années 2000 : établis à l’écart du monde sur l’île-vivante de Krakoa, la mutanité a découvert le secret de l’immortalité et se garde bien de le clamer à ses adversaires.

Un réveil inattendu.

© Marvel/Panini Comics

Ce secret décisif, les mutants le tiennent de la scientifique Moïra MacTaggert, qui se révèle être, sous la plume du scénariste, elle aussi une mutante, au pouvoir ô combien décisif : à chaque mort, elle renaît en conservant la mémoire de ses vies précédentes ! Elle a tout tenté pour résoudre le problème d’intégration des mutants dans le monde, de leur apporter son aide à tenter de les annihiler entourée des hommes ou des machines.

Lors de sa dixième vie, Moïra est parvenue grâce au pouvoir de son ami Charles Xavier et de nouveaux mutants de créer un cercle de résurrection où la psyché de chaque mutant sauvegardée par Cerebro est insufflée si besoin dans un corps de remplacement qui a les mêmes propriétés que le précédent. Est-ce que les mutants ainsi ressuscités sont bien les mêmes personnes ? La question reste en suspens.

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Tout mutant a le droit à la résurrection, sauf ceux qui ont un don de précognition permettant de connaître l’avenir. Voici le seul interdit posé par Moïra, sans que les mutants connaissent cette règle tacite acceptée par Charles Xavier et Magnéto ; les seuls à savoir que leur amie Moïra est une mutante. Cette règle, ils ont de plus en plus de mal à la tenir face à Mystique : la mutante polymorphe ne comprend pas qu’il lui est impossible de faire revenir à la vie sa femme Destinée, douée d’un don de précognition. Ainsi s’ouvre Inferno, avec la ferme intention de Mystique de braver tous les interdits pour redonner vie à l’amour de sa vie.

Nous avons apprécié le traitement dans cet événement de Charles Xavier et Magnéto, patriarches autoritaires à cause des secrets qui pèsent sur leurs épaules. Les souvenirs de Moïra leurs ont permis de bâtir une réalité où les mutants peuvent vivre en paix et se rêver hégémoniques s’ils le veulent. Ils sont donc ici prêts à tout pour défendre ce rêve, quitte à assurer eux-mêmes le spectacle car les adversaires de la mutanité (par exemple, les sentinelles Nemrod ou Oméga) ne sont pas prêts à rendre les armes !

Toutefois, nous avons apprécié davantage le traitement réservé aux figures féminines de l’événement : Hickman n’oublie pas que le Girl Power inhérent aux X-Men doit être entretenu ! Sans trop en dévoiler, nous avons beaucoup aimé la croisade menée par Mystique pour retrouver Destinée ; la mutante à la peau bleutée rappelant qu’elle est capable de très grandes choses quand on la sous-estime. Quand on n’a pas de pouvoirs de niveau Oméga chez les mutants, l’ingéniosité et la motivation peuvent suffire ! Nous avons aussi beaucoup aimé le traitement réservé ici à Emma Frost, qui rappelle aux vieux messieurs que ce n’est pas beau de mentir, même si on s’est convaincu que c’est pour une bonne raison.

© Marvel/Panini Comics

Derrière Emma Frost et Mystique, nous avons adoré le jeu politique que le scénariste a déroulé sur la scène de Krakoa : si Charles Xavier et Magnéto pensaient que leurs connaissances confidentielles leur permettraient de mener la mutanité là où ils le veulent, la réalité politique et les inimitiés viendront leur mettre d’énormes bâtons dans les roues. Est-ce que le plan de Mystique va réduire en cendres l’utopie des deux leaders mutants ?

Si le cynisme de la vie politique mutante nous a captivés, nous avons aussi apprécié que Jonathan Hickman ouvre une porte à l’idéalisme au travers du personnage de Cypher : tradition de l’époque de Chris Claremont oblige, c’est bienvenu d’incarner l’optimisme et la foi dans les valeurs humanistes dans cet innocent, mais plus candide, personnage.

Intégrer dix riches vies, c’est compliqué, même pour les meilleurs télépathes.

© Marvel/Panini Comics

Porté par les très jolies planches d’une équipe de dessinateurs talentueux qui l’ont accompagné ces dernières années, Jonathan Hickman rend une très belle copie avec Inferno, déroulant le tapis rouge pour les scénaristes qui le suivront afin qu’ils soient dans le confort pour leurs débuts.

Rapporté à la carrière du scénariste, Inferno n’est pas, à notre sens, du niveau de Secret Wars en terme d’événement, mais il n’empêche qu’il est de qualité et qu’il est très probable qu’il conclut un run qui restera dans la postérité de la série.

Jonathan Hickman a apporté un coup de fouet salvateur à un univers quelque peu laissé en friche par Marvel les années précédentes et nous espérons que les prochaines équipes créatives sauront profiter de ses fruits.