Dans la lune, dans ses dessins, dans ses silences... Zaza (le surnom d’Élisa) se sent mal partout et reprend goût à la vie en observant la nature, imaginant une amitié avec une araignée, ou se gorgeant des lumières de la nuit : "quand tout le monde dort, personne ne m’empêche de rêver". Inquiets, les parents d’Élisa multiplient les rendez-vous chez les spécialistes, qui diagnostiquent plusieurs blocages. Grâce à une orthophoniste plus sensible que les autres, et à son nouveau copain Léo (et ses grosses lunettes), les nuages qui hantent Élisa paraissent s’éloigner.
Sur le fond, ce récit de guérison, à hauteur d’écolière, va droit au but. La cruauté des enfants, l’incompréhension des adultes : pas de surprise sur ce plan-là, terrain connu, sans connotation péjorative. C’est à la fois crédible, sensible, poétique, avec une formidable valorisation de la création (le dessin, pour Élisa). Sur la forme, on évolue dans un univers d’une immense richesse. Qu’il s’agisse de la construction des planches, aux équilibres délicats, des visages magnifiquement rendus ou des ambiances nocturnes en pleine nature, une véritable grâce touche ces pages.
En fonction de leurs propres repères fictionnels, parents et enfants pourront retrouver ici des éléments de contes classiques, des allusions à Des Fleurs pour Algernon [1] (les fautes d’orthographe qui diminuent de page en page...) et à de multiples récits fantastiques. Un album qui évoque autant le harcèlement scolaire que les difficultés du langage, et qui fait triompher la magie du rêve et la contemplation apaisante du monde.
(par David TAUGIS)
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[1] classique de la science-fiction paru en 1956, signé Daniel Keyes et adapté depuis à la fois au théâtre et au cinéma