Initiative intéressante que celle de Nesim Fintz, directeur d’une école d’ingénieurs (EISTI), qui a décidé d’adapter en bande dessinée les 22 capsules qu’il avait réalisé pour France Info en 2006. L’objectif : trouver un angle (c’est le cas de le dire !) authentique et pédagogique pour traiter de résolutions mathématiques et de futurs programmes informatiques.
On retrouve dans ce premier tome dix premières histoires, chacune composé de 4 pages. Ce rythme permet de multiplier les thématiques sans lasser, car l’on passe en permanence d’une découverte à l’autre avec beaucoup de plaisir. Si on omet le récit de la création de Carthage avec une peau de boeuf, étrangemment placé en fin d’ouvrage, l’album propose au fur et à mesure des récits de plus en plus techniques, ce qui permet de rentrer dans le livre de manière progressive et toujours pédagogique.
L’autre grand atout de cet album est le socle historique de chaque récit. Loin d’une assommante démonstration, chaque découverte est le fruit de réflexion simple ou de l’ambition d’un ou plusieurs hommes et femmes de trouver une solution à un problème qui les taraude. On découvre ainsi comment les Egyptiens retraçaient des champs rectilignes après chaque crue du Nil vers 2000 av JC ; on fait la connaissance d’un joueur de dé à la cour du Roi Soleil qui insuffla la théorie des probalités à Pascal (voir ci-dessous) : on se passionne pour Eratosthène qui calcule la circonférence de la Terre avec une précision de 2% au IIIe siècle av JC, alors que des siècles durant, des autorités vont continuer à défendre que la Terre est plate !
Les explications mathématiques données sont relativement abordables pour un niveau allant de la 4e à la terminale. Un professeur peut donc aller piocher dans différentes histoires pour illustrer certains chapitres de son cours. Une petite "icône" solution représentant le Pr Fintz accentue l’aspect pédagogique de l’album.
La jeune dessinatrice Han-Mi Kim réalise un travail consciencieux, bien que logiquement perfectible vu son manque d’expérience. Un puriste de la bande dessinée pourrait se heurter du manque de lisibilité de certaines récitatifs sur fond semi-transparents, ou des phylactères en gras qui donnent l’impression que les personnages hurlent en permanence. Mais rien de tout ceci ne va gêner le lecteur désireux de mieux connaître les passionnantes origines des mathématiques.
Reste une "erreur" impardonnable dans le récit traitant du Nil : celle de préférer la perspective à la rigueur d’un triangle rectangle, ce qui diminue la pertinence de l’utilisation de son angle droit. On passe pourtant rapidement l’éponge, grâce à l’enthousiasme communicatif des auteurs, ceux-ci travaillant déjà sur le tome 2 !
(par Charles-Louis Detournay)
Cet article reste la propriété de son auteur et ne peut être reproduit sans son autorisation.