Associé à l’évènement Shoot the Book organisé par la Société Civile des Éditeurs de Langue Française (SCELF), cette conférence offrait l’occasion de réunir trois acteurs du marché afin de les entendre échanger autour du sujet de l’adaptation. Étaient présents : Marc du Pontavice, président de Xilam, Joey Brown, un scout américain venu à Angoulême représenter l’entreprise Netflix USA, et Guillaume Colboc, directeur du développement adjoint chez Gaumont.
Il a tout d’abord été question de savoir ce qui intéressait les trois invités en premier lieu lorsqu’ils sont confrontés à une bande dessinée. Ils se sont globalement mis d’accord pour expliquer que ce qui primait avant tout dans les choix d’adaptation, c’était la puissance du personnage principal, sa caractérisation et sa capacité à évoluer tout au long de l’intrigue.
Selon eux, c’est un personnage fort qui peut conduire le public à adhérer à une licence. Il est nécessaire, de savoir comment l’alliance d’un metteur en scène et d’un scénariste peut être pertinente pour transcender le matériel initial qu’est la bande dessinée. Guillaume Colboc a évoqué le cas de « La Grande Odalisque » la bande dessinée de Vivès, Rupert et Mulot publiée chez Aire-Libre, une BD ou les scènes d’action sont très impressionnantes, l’essentiel selon lui, est de trouver des solutions pour faire quelque chose de réaliste et d’abordable par rapport à ce qui pourra être levé en termes de fonds.
Marc du Pontavice explique qu’en revanche, la licence peut être un immense avantage pour le marketing, autant qu’elle peut être un piège dans la mesure où la marque est parfois vraiment contraignante. Selon lui, il est important d’adopter un angle, un parti-pris assez fort pour se désinhiber de l’œuvre originale : « Dans un univers de référence, il y a un moteur narratif, des personnages. Il est important de trouver une rupture de ton pour s’approprier pleinement la licence. Jusqu’à quel point une force narrative peut-elle se détacher de son support d’origine ? Avec "Blast", cela n’a pas fonctionné. C’est un gros travail euristique quand on lit une bande dessinée et que l’on veut l’adapter. »
Joey Brown explique qu’il est important de ne pas se focaliser sur un seul et unique projet et que, de son côté, toute son attention est portée sur des voix singulières s’inscrivant dans des dynamiques locales en citant l’exemple de la récente série Netflix adaptée d’après l’œuvre de Zérocalcare, Kobane Calling, (Cambourakis). Tout l’enjeu, selon lui, est de déterminer à quel point l’œuvre initiale est particulière.
Guillaume Colboc explique qu’il n’y a pas de règles figées, que les idées viennent de partout et qu’il est nécessaire de ne pas se fermer de porte. Il justifie que Gaumont « Ne cherche que des coups de cœur mais des visions d’adaptations qui font la différence ; des propositions pour emmener le producteur quelque part. »
Concrètement, ils expliquent que l’essentiel est d’adhérer à la vision d’une adaptation et non à un album spécifique, en travaillant dans une relation de confiance et de transparence avec l’ensemble des différentes parties prenantes.
À la question du droit de regard des auteurs, Joey Brown répond qu’il faut agir si cela s’y prête en évoquant un principe : « Not avoid them to having us telling them fans ‘’I was betrayed’’ » (Ne pas les éviter afin qu’ils ne disent pas aux fans : "J’ai été trahi !...")
Le marché des adaptations est aujourd’hui multiple et on constate une pluralité évidente dans les différentes manières de faire de la prise de vue réelles (sans parler de l’animation), ce qui implique de motiver et de justifier également des choix techniques.
Aux personnes qui souhaiteraient soumettre des projets d’adaptation, les trois invités dispensent plusieurs conseils :
– Rédiger un synopsis de dix lignes pas plus, sous forme de pitch
– Associer à ce pitch des pièces visuelles pour l’accroche (2/3 images, pas plus)
– Disposer pour l’auteur d’un certaine qualité de représentation (via un éditeur, un agent...)
Toujours bon à prendre...
(par François RISSEL)
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