A l’occasion de la commémoration du centenaire de la naissance de Jijé, la Maison de la bande dessinée organise une grande rétrospective sur l’oeuvre de cet artiste belge, père fondateur de l’Ecole de Marcinelle. Plus de 140 oeuvres sont exposées, comprenant bandes dessinées (Spirou, Blondin et Cirage, Jean Valhardi, Jerry Spring, Tanguy et Laverdure, etc.), inédits, peintures et sculptures.
Joseph Gillain est un homme qui n’a jamais su rester en place. Sa formation artistique commence dans la sculpture et l’orfèvrerie, avant de s’orienter vers la peinture, puis la bande dessinée. Déjà son parcours s’annonce sous le signe du changement.
C’est en 1936 qu’il crée son premier personnage de BD, Jojo, qu’Hergé trouvera fort ressemblant à son Tintin. Mais la ligne claire de Gillain ne va cesser d’évoluer, de prendre plus de liberté. Si ses premiers scénarios semblent naïfs et son trait encore amateur, il fait néanmoins preuve d’une vitalité imaginative prodigieuse.
Signant désormais Jijé, il lance en 1939 Blondin et Cirage dans l’hebdomadaire Petits Belges, et fait son apprentissage dans les pages de Spirou, le nouveau journal des éditions Dupuis. Spirou se révèle vite un formidable laboratoire, dans lequel Jijé invente de nombreux personnages (Jerry Spring, Jean Valhardi), et reprend le héros du français Rob-Vel, le groom Spirou, auquel il joint un doux ahuri, Fantasio. Il signe aussi des récits réalistes avec les biographies de Don Bosco, Christophe Colomb, et Baden Powell. Son trait s’affine, fait preuve d’un grand sens du mouvement et d’une parfaite maîtrise du noir & blanc. Jijé accueille chez lui et conseille les jeunes talents fraîchement débarqués, Franquin, Morris et Will., et devient le chef de file d’une école qui allait révolutionner la bande dessinée.
Travailleur acharné et perfectionniste, Jijé prônait la variation. Variation des thèmes, du style, des outils à dessin, pour améliorer sa technique mais aussi pour le plaisir du changement et de la découverte. Toujours tourné vers la nouveauté, il la quittait sitôt trouvée. Il dessinait sans regarder le papier, faisant de sa main le prolongement de ses yeux, peignait souvent de la main gauche, « croquait » dans la rue, troquait la plume pour le pinceau, passait d’un genre à un autre. Il craignait les automatismes, les gestes d’habitude qui tuent toute expression dans le dessin. Ainsi Jijé insuffle beaucoup de vie dans ses personnages, dont les caractères se révèlent alors très subtils.
Dans sa bougeotte, Jijé ne parvient pas à se fixer sur un personnage, ce qui est pourtant, avoue-t-il, la meilleure méthode pour s’imposer au public. Aussi confie-t-il Spirou à Franquin, Jean Valhardi à Paape, et Blondin et Cirage à Hubinon.. En 1967, il remplace Uderzo sur Tanguy et Laverdure, avec Jean-Michel Charlier, et reprend avec son fils le Barbe-Rouge abandonné par Hubinon..
L’œuvre de Jijé est une oeuvre de vie et d’audace. Des fourmis dans les mains, il laisse derrière lui six séries et près de quatre-vingt albums…
Du 3 décembre 2013 au 3 aout 2014,
du mardi au dimanche de 10h à 18h,
Bd de l’Impératrice 1,
1000 Bruxelles
tel 02 502 94 68
www.jije.org
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