Créé en 1919 par l’écrivain américain Johnston McCulley (1883-1958), Zorro (mot espagnol qui signifie « Renard ») a vécu le temps de quatre romans historiques glorifiant la Californie du Sud à l’époque où elle est encore sous domination espagnole au début du XIXe siècle.
Don Diego de la Vega est un jeune aristocrate californien qui s’emploie à ridiculiser une administration espagnole corrompue.
Le premier volume intitulé The Curse of Capistrano (La Malédiction de Capistrano) publié en feuilleton dans le Dime Novel (roman à cinq sous) All-Story Weekly reçoit un tel accueil qu’Hollywood s’en saisit l’année suivante avec La Marque de Zorro (1920) avec Douglas Fairbanks dans le rôle-titre, lequel co-signe le scénario avec Johnston McCulley et Eugene Miller.
On notera que le célèbre « Z » apparaît dans la version cinématographique et non dans le roman. De même, le fameux loup qui est son autre marque de fabrique (dont s’inspirera Bob Kane pour Batman) n’a été figé que tardivement, le roman original usant d’un voile noir (voir illustration) et le premier film un foulard réservé de deux trous pour les yeux. D’ailleurs, l’identité de Zorro est révélée dès le premier roman.
C’est le début d’un succès qui ne s’est pas démenti depuis : plus de 50 millions de livres vendus et un destin cinématographique et télévisé sans équivalant, marqué en particulier par la série télé de 82 épisodes produite par Walt Disney entre 1957 et 1961. On notera que le Sergent Demetrio Lopez Garcia est une création du feuilleton-télé, le personnage original s’appelant Gonzales.
Alex Toth transcende Zorro
C’est André Oulié qui en est le premier traducteur graphique en bande dessinée en France dans Zorro (1947) une suite de Jeudi Magazine des éditions Chapelle, reprenant le héros à l’imitation de la publication contemporaine de Tarzan. Il l’illustra sans discontinuer jusqu’en 1967, repris ensuite par Jean Pape.
Mais ces versions n’ont rien à voir avec celle qu’Alex Toth réalisa pour Dell Publishing à partir juin 1958 (Four-Color N°920). Elle est directement inspirée par la version télévisée du personnage, bien que son dessinateur préféra donner au héros les traits de Errol Flynn et non ceux de l’acteur du feuilleton Guy Williams dont le portrait figurait pourtant sur les premiers fascicules publiés par Dell.
Ces pages revêtent une importance historique en raison du fait que ce sont parmi les premiers travaux d’Alex Toth faits à son retour du Japon où il passa son service militaire. L’intrépidité de son pinceau montre une audace nouvelle qui tranche avec l’encrage compassé du Golden Age, peut-être inspirée par l’art japonais. Ses effets de noir & blanc, héritiers de Milton Caniff et Harold Foster, ses maîtres revendiqués, de même que l’efficacité de ses plans et de ses solutions graphiques, subjuguent ses contemporains. Jijé puis plus tard Frank Miller et Mike Mignola le regardent de près.
Glénat fait ici un joli travail de publication (avec une nouvelle traduction d’Alain David), meilleure que la version de Futuropolis dans la collection Copyright qui, il faut bien le dire, était un désastre.
(par Didier Pasamonik (L’Agence BD))
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