Tout commence lorsqu’Anaïs, la plus jolie fille du village, emprunte à Mia sa boucle d’oreille rose. Une seule boucle, Mia ayant perdu l’autre ! C’est là que tout s’emballe.
Quelques filles du village se fabriquent également cet accessoire, et de l’anecdotique nous basculons au phénomène de société. Cette épidémie atteint progressivement toutes les filles, leurs mères, puis l’ensemble des femmes du village. Mais ce qui n’était qu’anodin ne le reste pas : on regarde de travers celles qui ne se plient pas à la mode, certains commerçants refusent de leur vendre leurs produits. D’autres, au contraire, veulent davantage se distinguer de cette boucle, signe devenu identitaire, en ne s’habillant qu’en noir.
Mia, qui est bien involontairement à l’origine de cette dérive, ne sait que faire. Anaïs, elle aussi, se désole de voir la tournure que les événements prennent. Comme l’héroïne l’indique, « avant la boucle d’oreille rose, la vie était, paradoxalement, plus rose ».
Avec sa boucle d’oreille rose, Séraphine Menu nous propose une fable universelle et simple sur la pression de groupe, l’individualisme face au collectif et, bien entendu, sur la Liberté.
C’est un message universel, transgénérationnel qui peut sembler cliché mais qu’il est tellement important de rappeler sans cesse, de crier haut et fort : les libertés individuelles ne doivent jamais être l’excuse d’une gêne pour les autres, mais la pression du collectif ne doit jamais étouffer notre libre arbitre.
Nous retrouvons dans cette œuvre tout l’esprit de la magnifique nouvelle Matin brun de Franck Pavloff, publiée en 1998 et maintes fois réédité. Les illustrations de Sylvie Serprix, en couleur directe, sont superbes et participent à la lecture d’un très bel album, à partager avec son entourage.
Cet album a été sélectionné pour le prix BD 2023 France Bleu / ActuaBD.
(par Jérôme BLACHON)
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