Ce douzième titre qui termine le cycle des complots voit le retour en grâce de Murena auprès de l’empereur. Lucius se remet doucement des drogues que Lemuria lui a administrées afin qu’il reste sous son emprise. Il parvient à convaincre César et à se disculper d’une accusation de trahison. Nul n’est cependant à l’abri du danger dans l’entourage de Néron. La tension est maximale parmi ceux qui gravitent autour du Princeps. Ce dernier suspecte à juste titre qu’on tente de l’assassiner. La conspiration de Calpurnius Pison sera-t-elle déjouée ?
Si Jean Dufaux respecte les faits historiques dans les grandes lignes, il ne s’en défend pas : il s’accorde quelques minces libertés pour les besoins du scénario. Même si la rigueur est de mise, la fiction prime. Le lecteur sera surpris sans se sentir trompé pour autant. Chaque album depuis le début de la série comprend des scènes inédites encore jamais exploitées en bande dessinée. Ainsi, si vous n’aviez jamais pensé à ce que pourrait être une course sur les toits des lupanars de Rome, Jean Dufaux l’a imaginée pour vous.
Parmi les personnages de ce théâtre « Dufaux-Theo- Delaby », certains sont historiques comme le philosophe Sénèque ; mais le précepteur connaîtra une fin sensiblement différente de celle retenue dans nos livres d’Histoire. Le scénariste le mentionne en fin d’ouvrage afin sans doute d’éviter une levée de boucliers de la part des puristes ou tout simplement afin de ne pas induire en erreur le lecteur moins soucieux de véracité.
Un personnage ambigu de pure fiction vient perturber davantage Néron qui sombre déjà dans la folie. L’Hydre est une esclave qui combat les gladiateurs. Ses origines énigmatiques ainsi que la franchise de son approche troublent l’empereur. Jean Dufaux est passé maître dans l’art de tirer les ficelles scénaristiques depuis longtemps. Son public le connaît et apprécie son modus operandi.
La narration est sublimée par le dessin de Theo. Les rues peuplées de Rome sont vivantes. Si l’on observe les détails, notre imagination peut aisément nous transporter et entendre le brouhaha de la plèbe, sentir les odeurs qui se dispersent au gré de notre progression dans cette Rome du Ier siècle de notre ère minutieusement reconstituée. Le dessinateur excelle également dans la représentation des acteurs. Un casting de rêve qu’aucun cinéaste ne pourra jamais rassembler. Les regards sont expressifs. Les vêtements épousent les formes des corps. Les coiffures, tantôt sophistiquées des femmes de haut rang, tantôt collantes de sueur des combattants, les bijoux masculins ou féminins, les uniformes, les accessoires de décoration, la végétation, l’ameublement et bien entendu l’architecture sont les détails attendus et appréciés par les fans de la série et les historiens pointilleux.
Si ce cycle des complots se termine dix ans après la disparition de Philippe Delaby qui l’avait débuté avec le tome 9, Jean Dufaux nous annonce avoir déjà entamé le cycle suivant, qui sera le dernier. Il nous réserve d’autres belles surprises. Nous connaîtrons le destin de Lucius Murena. Quant au sort de Néron, nous le connaissons et l’Histoire a retenu sa dernière phrase :
Qualis artifex pereo !
(par David SPORCQ)
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