L’événement s’organise en six parcours. Chacun aborde un aspect de la bande dessinée. Une première exposition propose un dialogue entre les trois principaux foyers de la production de bande dessinée : la bande dessinée européenne, les mangas asiatiques et les comics américains qui réuniront un grand nombre d’oeuvres et d’auteurs, de Hergé à Breccia, de Philippe Druillet à Chantal Montellier, de Moebius à Eric Lambé, de Marjane Satrapi à David B, de Nicole Claveloux à Edmond Baudoin...
Dans la seconde, au sein de la collection permanente, les commissaires font le choix de mettre en regard des œuvres d’auteurs actuels avec celles d’artistes célèbres, comme par exemple, Balthus avec Blutch, Jules Pascin avec Joann Sfar, Paul Klee avec Brecht Evens, Robert Doisneau avec Emmanuel Guibert, ou encore Mark Rothko avec Catherine Meurisse.
À côté de ce contrepoint, six petites installations monographiques d’auteurs incontournables de l’Histoire de la bande dessinée : Winsor McCay, Geo McManus, Georges Herriman, Hergé, Edmond-François Calvo et Will Eisner.
On remarquera dans ces expositions un véritable souci de faire dialoguer les arts avec la bande dessinée. Elles sont conduites par les commissaires Anne Lemonnier, éditrice et attachée de conservation au Musée national d’art moderne et Emmanuelle Payen, directrice du département Développement culturel et Cinéma à la Bibliothèque Publique d’Information, assistées par deux conseillers scientifiques : Thierry Groensteen, théoricien et historien de la BD, ancien directeur du Musée de la bande dessinée à Angoulême, et Lucas Hureau, responsable des projets de Michel-Édouard Leclerc liés à la BD après dix ans à la maison Artcurial.
Un esprit malicieux postulerait qu’aux yeux de Beaubourg, on ne peut pas « seulement » parler de bande dessinée ; mais un autre esprit enjoué expliquerait que c’est là une belle manière de légitimer le 9e art : pointer les similitudes (et les différences !) qui peuvent exister entre des œuvres d’auteurs de BD et celles de grands artistes, qu’ils soient peintres, photographes, sculpteurs ou plasticiens, et ceci d’égal à égal.
L’exposition est soutenue par le Fonds Hélène & Edouard Leclerc, et la collection de Michel-Edouard Leclerc, que l’on sait très riche en originaux de bandes dessinées, un patrimoine exceptionnel qui a déjà permis d’excellentes expositions dans leur site à Landerneau, comme celle dédiée à Métal Hurlant et à (A Suivre), à Lorenzo Mattoti, et très récemment, une rétrospective d’Enki Bilal… Bref, nul doute que de magnifiques planches seront exposées !
L’exposition dédiée à Hugo Pratt - dans l’écrin habituel de la BPI qui a déjà accueilli Chris Ware, Catherine Meurisse, Riad Sattouf et Posy Simmonds, s’intéressera quant à elle aux références littéraires du maître vénitien : Arthur Rimbaud, Hermann Melville, Joseph Conrad, Jack London… ; un dialogue fécond.
À côté de ces trois grands parcoutrs, une expo consacrée à Marion Fayolle se tiendra dans la Galerie des enfants : les visiteurs pourront découvrir son univers poétique en traversant trois grandes « tentes-têtes » qui abritent chacune « des moments de partage, de découverte et d’étonnement ».
La programmation se veut aussi un champ de découvertes, d’où cette exposition qui se tiendra au Niveau -1 consacrée à une revue de bande dessinée alternative qui fête son dixième anniversaire : la revue Lagon (du 29 mai au 19 août 2024).
En regardant ce programme, une question vient rapidement à l’esprit : parmi tous les auteurs convoqués, où est passée la bande dessinée populaire ? Elle s’y trouve. Franquin, Reiser, Fred, Tezuka, Jean-Claude Forest et d’autres sont là. Mais on ne peut pas tout exposer ; là, le choix des commissaires s’exprime : Moebius et non Giraud, Crepax et non Manara... Nous ne manquerons pas de revenir sur ces choix dans de prochains articles.
Un tel navire-amiral ne navigue pas sans son cortège : plusieurs événements éphémères (discussions, concerts, performances et ateliers) se dérouleront du 29 mai au 1er juillet au Niveau -1. Le détail de ces événements, des dates et des personnalités invitées est disponible sur le site du Centre Pompidou. Nous aurons l’occasion d’y revenir sur ActuaBD.com.
En conclusion, la bande dessinée n’a peut être pas encore à Paris le musée dédié qu’elle mérite, mais avec cette exposition, c’est une grande étape qui est franchie. De « Low Art », la bande dessinée devient un « High Art » ? Peut-être, les prix astronomiques de certains auteurs dans les galeries et les ventes publiques en témoignent. Raison de plus pour aller admirer les centaines de chefs d’œuvre qui nous attendent.
Voir en ligne : LE SITE DE L’EVENEMENT
(par Hippolyte ARZILLIER)
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Du 29 mai au 4 novembre 2024
– « Bande dessinée (1964 - 2024) » | Exposition, Galerie 2, niveau 6
– « La bande dessinée au Musée » | Accrochage Musée, niveau 5
– « Corto Maltese. Une vie romanesque » | Exposition, Bibliothèque publique d’information, niveau 2
– « Tenir tête ». Une exposition-atelier de Marion Fayolle, Galerie des enfants, niveau 1
Du 29 mai au 19 août 2024
« Revue Lagon, le chemin de terre » | Exposition | Niveau -1
Du 29 mai au 7 juillet 2024
« La BD hors des cases » | Programmation vivante | Niveau -1
En médaillon : affiche de Fanny Michaelis.
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