RELECTURE. Thomas Owen, maître belge du fantastique, avait préfacé jadis cet album publié une première fois dans la collection Atomium des éditions Magic Strip. Il avait été frappé par cette « ambiance fantastique » et ces « marionnettes s’agitant et hurlant, se vautrant dans l’horrible, le monstrueux et le macabre, climat où Philippe Foerster, écrit-il, s’exprime avec une brillante efficacité narrative. »
Tout est dit : Foerster est le maître de l’humour macabre de Fluide Glacial, là où Gotlib et Goossens prospéraient dans l’absurde, et Binet ou Edika dans la chronique sociale. Son graphisme, formaté au cinéma expressionniste et aux films d’horreur de la Hammer, relit les grands mythes de l’enfance en leur conférant une dimension comique d’autant plus marquante qu’elle s’habille de macabre.
Geppetta, sorte d’Edith Piaf tragique, a sculpté sa marionnette dans du bois de mandragore. C’est ce Pinocchio à face de Frankenstein -il est au sens propre, un monstre- qui s’échappe comme un Golem des mains de sa créatrice pour étrangler les jeunes filles qui lui tombent sous la main. Ses crimes ont beau être horribles, elle excuse sa créature puisque c’est elle, et elle-seule, qui est responsable de ce massacre.
Foerster a raison de rappeler que le mythe de Pinocchio adapté à l’écran par Disney confère à ce conte une glaçante dimension d’horreur. La parodie de Foerster éclaire davantage encore l’œuvre géniale de Collodi.
KN
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